« Soyons prudents avec les pirouettes de l’Irak »

Be cautious over Iraq’s somersault
The Guardian (Royaume-Uni)

[AUTEUR] Jack Straw est ministre des Affaires étrangères du Royaume-Uni.

[RESUME] Hier, Saddam Hussein a accepté la résolution adoptée unanimement par le Conseil de sécurité de l’ONU sur le retour des inspecteurs en désarmement en Irak. Il faut cependant rester prudent car, il y a deux mois à peine, il affirmait que jamais il ne permettrait un retour des inspecteurs dans son pays.
La communauté internationale a montré que la volonté de désarmer l’Irak n’était pas qu’une obsession américaine. De même, ceux qui affirmaient que la crise irakienne marquait la fin de la coopération entre l’Europe et les États-Unis se sont trompés, ces deux partenaires étaient en désaccord sur des détails, mais étaient d’accord sur l’essentiel : il faut désarmer Saddam Hussein.
La résolution 1441 montre que la communauté internationale ne supportera plus que Bagdad ignore les décisions de l’ONU et que, bien que la guerre ne doive être que le dernier recours, Saddam Hussein s’expose à de graves conséquences s’il veut à nouveau défier les Nations Unies.

« La folie des grandeurs de Saddam Hussein »

Saddam Hussein’s Delusion
New York Times (États-Unis)

[AUTEUR] Amir Taheri est rédacteur en chef du journal français Politique Internationale.

[RESUME] Le vote de la Syrie en faveur de la résolution 1441 du Conseil de sécurité sur le désarmement de l’Irak et la demande faite à Saddam Hussein, par les dirigeants de la Ligue Arabe, d’accepter cette résolution ont dû choquer le président irakien. En effet, Saddam Hussein se considère comme le champion de la cause arabe et estime que son pays doit assumer la direction du monde arabe.
Cette volonté de puissance n’est pas qu’un problème pour les voisins de l’Irak, c’est également un problème pour les Irakiens. Ce pays est, en effet, une mosaïque de peuples et de cultures dans lequel onze langues coexistent ("Irak " et "Bagdad" sont des mots perses et le Tigre et l’Euphrate ont des noms grecs). Malgré cette réalité, pour Saddam Hussein, tous les Irakiens sont arabes et l’arabisation du pays est une de ses obsessions. Ainsi en 1970, il a fait expulser de nombreux Irakiens d’origine perse et, en 1980, il a commencé un programme d’arabisation du Kurdistan irakien en rasant près de 4000 villages et en déplaçant leur population dans la décennie qui a suivi.
L’arabisation de l’Irak voulue par Saddam Hussein peut passer par l’usage de la violence et même du génocide. Sa volonté de posséder des armes de destruction massive est dictée par cette obsession et son désir de contrôler tout le Golfe persique.

[CONTEXTE] Contrairement à ce qui est sous-entendu dans cet article, Saddam Hussein n’était pas le président irakien en 1970 lors de l’expulsion de la population d’origine perse. Il n’était alors que le vice-président du président Al Bakr, qu’il renversa en 1979. De même, ainsi que l’a établit le rapport de l’US Army War College en avril 1990, les villages kurdes rasés et les populations déplacées dans les années 80 sont pour l’essentiel une conséquence de la guerre Iran-Irak.

« Les militaires n’ont pas leur place au gouvernement »

The military has no place in government
Gulf News (Dubaï)

[AUTEUR] Husain Haqqani a été conseillé des Premiers ministres pakistanais Benazir Bhutto et Nawaz Sharif, puis ambassadeur du Pakistan au Sri Lanka. Il est membre du Carnegie Endowment for International Peace à Washington, pour lequel il vient de réaliser une étude dont cet article présente les conclusions.

[RESUME] Pervez Musharraf a réussi, par ses manigances, à empêcher la création d’un gouvernement civil au Pakistan plus d’un mois après les élections parlementaires. Musharraf tente de gagner du temps en discutant avec le Pakistan People Party (PPP) de Benazir Bhutto, mais en refusant de parler directement avec elle ; en exigeant que l’Alliance Islamique (MMA) face partie du gouvernement, tout en refusant qu’un de ses membres soit Premier ministre.
En acceptant ce marchandage, les partis politiques pakistanais font le jeu des militaires. La communauté internationale doit exiger que le président pakistanais restaure la démocratie dans son pays et engage un dialogue avec l’ancienne Premier ministre en exil, Benazir Bhutto.
Tous les partis politiques pakistanais, y compris les islamistes du MMA qui ont obtenu de bons résultats dans les provinces limitrophes de l’Afghanistan, sont prêts à maintenir l’alliance avec les États-Unis si ces derniers soutiennent la démocratie. En effet, l’antiaméricanisme d’une partie de la population ne naît que du soutien de Washington à la junte militaire.

« Pour apaiser les tensions, concentrons nous sur le commerce plutôt que sur le Cachemire »

To ease tension, focus on trade rather than Kashmir
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] Selig S. Harrison travaille à l’Asia Program du Center for International Policy, une fondation demandant l’arrêt de toute coopération militaire des États-Unis avec des pays non-démocratiques.

[RESUME] L’Inde et le Pakistan ont retiré leurs troupes des frontières du Cachemire, ouvrant ainsi la voie à des négociations. Malheureusement, le Pakistan est au main de militaires qui, historiquement, se sont montrés moins prêts à négocier avec le voisin indien que les gouvernements civils.
Les États-Unis devraient faire pression sur Pervez Musharraf pour qu’il engage un dialogue avec l’Inde, pas seulement sur la question du Cachemire mais également sur celle des échanges commerciaux. En effet, une coopération économique entre ces deux pays, dont une bonne part des habitants vit sous le seuil de pauvreté, permettrait de résoudre la plupart des difficultés rencontrées par la population du sous-continent.
Ces négociations commerciales, liées à un abandon par New Delhi et Islamabad du soutien aux groupes extrémistes sous la pression des États-Unis, peuvent faire émerger les conditions nécessaires à une paix durable dans la région et à un développement économique profitable à tous.

« Les Amériques vont comme l’Argentine va »

As Argentina goes, so go the Americas
Christian Science Monitor (États-Unis)

[AUTEURS] Kiplin Pastor est étudiant à l’Universidad de Buenos Aires. Robert Pastor est vice-président et professeur de relations internationales à l’American University à Washington. Il est ancien directeur du programme Amérique du Sud et Caraïbe du Carter Center et ancien ambassadeur des États-Unis au Panama en 1993. Il a été le conseiller pour les questions liées à l’Amérique du Sud de tous les candidats démocrates à l’élection présidentielle depuis 1976.

[RESUME] L’Argentine est en crise financière et on aurait tort d’y voir une crise chronique de plus qui va bientôt prendre fin. Au contraire, la crise se prolonge car ni les dirigeants de ce pays, ni ceux du FMI, ni ceux des États-Unis n’ont pris les mesures nécessaires pour y remédier.
L’Argentine n’est pas le seul pays d’Amérique latine à connaître des difficultés. En effet, la Colombie est en guerre civile, l’escalade se poursuit entre Hugo Chavez et son opposition au Venezuela et les systèmes politiques du Pérou, de l’Équateur et de la Bolivie sont en train de s’effondrer. Les incertitudes concernant la réaction des investisseurs internationaux à l’élection de Lula au Brésil, la première économie de l’Amérique du Sud, ne sont pas rassurantes non plus et il n’y a plus guère que le Chili qui connaît une forte croissance dans cette région.
Les États-Unis, obnubilés par l’Irak et leur sécurité nationale, semblent se désintéresser du continent malgré cette situation désastreuse. Si l’administration Bush veut éviter que la crise se propage, elle doit aider l’Argentine et engager des discussions avec Lula. Elle doit également pousser à des négociations entre Chavez et son opposition et intégrer davantage le Mexique dans l’Accord de Libre Echange Nord Américain (ALENA) afin de démontrer aux pays pauvres du continent les bienfaits économiques des zones de libre échange.