« Au nom de la démocratie, M. Blair, lisez ceci avant d’envoyer mourir un seul Britannique »
In the name of democracy, Mr Blair, read this before you send a single Briton to die
The Times (Royaume-Uni)
[AUTEUR] Tam Dalyell est député travailliste et doyen de la Chambre des communes.
[RESUME] M. Le Premier ministre,
Si l’action militaire dans les Malouines et dans le Golfe était basée sur une adhésion générale, ce n’est pas le cas aujourd’hui de la guerre en Irak. Les principales autorités religieuses du pays se sont déclarées opposées à la guerre, on ignore quels sont les objectifs militaires et s’ils méritent que des vies britanniques et irakiennes soient sacrifiées pour eux. Aussi, avant de suivre le trio Cheney-Rumsfeld-Wolfowitz et d’engager plus de troupes britanniques dans le Golfe, il vous faut demander l’accord de la Chambre des communes sur un texte sans ambiguïté qui vous permettra, ou non, de mener la guerre sans l’accord de l’ONU.
M. le Premier ministre, nous sommes une démocratie parlementaire et chacun des élus a la responsabilité des actes de son pays. Vous êtes dans l’obligation de soumettre une attaque au vote du Parlement.
Selon le Cheikh Sultan Ben Zayed Al Nahyan, dirigeant des Émirat arabes unis, une attaque contre l’Irak sera vue dans le monde arabe comme une guerre des chrétiens contre les musulmans et aura des conséquences terribles. De plus, le coût de cette guerre grèvera fortement le budget prévu pour aider les populations d’Afrique que le Royaume-Uni devait aider, comme vous l’aviez promis.
Vous devez soutenir Hans Blix et si le trio Cheney-Rumsfeld-Wolfowitz veut attaquer quoi que fasse l’Irak, vous devez refuser de les suivre et reconnaître que leur véritable objectif est le pétrole irakien.
La population états-unienne ne veut pas mener la guerre seule et si vous refusez la participation britannique à cette guerre, Bush devra reculer. Vous avez ce pouvoir.
« Crises du Moyen-Orient : tous coupables »
Crises du Moyen-Orient : tous coupables
Le Monde (France)
[AUTEUR] Robert Malley est directeur du Middle East Program de l’International Crisis Group. Il a été l’assistant spécial du président Bill Clinton sur la question Israélo-Arabe (1998-2001).
[RESUME] En deux ans, le président Bush a déjà transformé le Proche-Orient alors qu’il en avait été à peine question dans son programme électoral. Aujourd’hui, tous les pays du Proche-Orient vivent dans l’attente, la crainte et parfois la ligne de mire de Washington. Cette région est devenue à la fois la priorité et le véritable laboratoire d’essai de l’exercice de la puissance des États-Unis. Pour l’Amérique, dans cette région, l’instabilité semble être devenue une vertu alors que traditionnellement Washington y recherchait la stabilité.
Il est difficile de saisir la stratégie américaine, et pour cause, elle n’existe pas. George W. Bush balance sans cesse entre la tendance pragmatique et multilatéraliste et la tendance unilatéraliste, interventioniste et moraliste de son administration. Aujourd’hui, toutefois, c’est ce dernier groupe qui a une position privilégiée pour trois raison :
– Il offre une ambition stratégique dans la région que n’a pas son rival avec comme objectif la constitution d’un Proche-Orient plus démocratique et plus pro-américain. Dans leur analyse, le Proche-Orient a remplacé l’Europe de l’Est et ils comptent sur une victoire américaine en Irak pour provoquer un effet domino qui entraînera la réalisation du reste de leurs objectifs dans la région.
– Depuis les attentats du 11 septembre, l’Amérique s’estime en état de guerre. Désormais, la politique étrangère est une affaire de sécurité intérieure. Le 11 septembre fournit une justification politique et idéologique à la mise en place de leur politique.
– Malgré les inquiétudes du reste du monde sur les conséquences de la guerre en Irak, Washington est parvenu à imposer sa vision dans la région. Personne ne proteste plus face au projet de marginalisation de Yasser Arafat, ni face au caractère inéluctable qu’a pris la guerre contre Bagdad. Les discussions sur les questions secondaires sont permises mais, pour les orientations générales, c’est Washington qui prend les décisions. Tout se passe comme si le monde craignait autant l’action de Washington que le fait de s’y opposer.
Face à cette situation, la question essentielle pour la communauté internationale est : que faire ? ou qu’aurait-il fallu faire ?
L’Union Européenne et les pays arabes auraient dû prendre, dès le départ, une part plus active dans le dossier israélo-palestinien et peser de tout leur poids. Aujourd’hui, ils doivent pousser à la reprise des négociations, non pas sur les bases du "plan de route pour la paix" du quatuor diplomatique, auquel plus personne ne croit, mais sur les bases de la résolution du sommet de Beyrouth. Celle-ci a été trop vite abandonnée parce que les États-Unis et Israël ne lui ont pas fait l’accueil qu’elle méritait. On ne doit pas la laisser mourir et il faut la proposer au Conseil de sécurité de l’ONU. Dans le même temps, les Palestiniens doivent s’unir, renoncer à la violence et soutenir ce plan en reconnaissant Israël dans les frontières de 1967.
Sur le dossier irakien, l’Union Européenne et les pays arabes ne doivent pas laisser à Washington le monopole de la préoccupation sur le désarmement du pays et ils doivent construire une alternative crédible à la politique états-unienne. Cette dernière est dangereuse, mais elle repose sur des griefs réels qui doivent être pris en compte pour construire l’alternative.
De même, au Proche-Orient, les pays arabes doivent se réformer et se concentrer sur leurs maux intérieurs pour éviter que viennent de Washington, à la fois les mauvaises réponses et les bonnes questions.
« La justice après l’arrêt des combats »
Justice after the fighting stops
International Herald Tribune (États-Unis)
[AUTEUR] Dennis McNamara est haut fonctionnaire du Haut Commissariat aux réfugiés de l’ONU. Il a travaillé sur les opérations de maintien de la paix au Cambodge, au Kosovo et au Timor oriental.
[RESUME] Malgré la profusion de règlements internationaux humanitaires, les conflits armés sont généralement sans lois et ouvrent la voie à des groupes criminels qui utilisent le chaos pour s’enrichir ou prendre le pouvoir, comme ce fut le cas en Bosnie et en République démocratique du Congo. Aussi, le seul moyen efficace d’éviter un retour des violences sur le long terme après l’arrêt des combats est de mettre en place rapidement un système judiciaire efficace. Sans un régime fondé sur la loi, les voyous dominent et il n’y a pas de démocratie possible.
Après chaque conflit, il faut agir vite, car plus l’intervention est lente plus les règlements de compte et les injustices sont nombreux. L’ONU doit être prête à envoyer dans les zones de conflits, dès l’arrêt des combats, une police qualifiée, des juges, des procureurs, des avocats, des interprètes, une administration judiciaire et du personnel pénitentiaire. L’ONU doit donc disposer en permanence de ce type d’effectif.
Après les conflits, les graves injustices doivent être réparées sous peine de ne pas parvenir à assurer la stabilité. Nous savons cela par expérience, mais nous n’avons pas appliqué cette expérience dans nos règles et nos pratiques politiques.
« L’Afghanistan a besoin d’une économie »
Afghanistan needs an economy
The Washington Times (États-Unis)
[AUTEURS] Don Ritter est un ancien député états-unien Républicain (1979-1993) ayant régulièrement pris position dans les années 80 pour l’aide aux Afghans contre les Soviétiques. Il est président de l’Afghanistan - America Foundation. Mahmood Karzai est le frère aîné d’Hamid Karzai. Il est un homme d’affaire américano-afghan vivant aux États-Unis et membre fondateur de la chambre de commerce américano-afghane (AACC).
[RESUME] La sécurité et la situation économique de l’Afghanistan sont interdépendantes car la reconstruction de l’économie afghane apportera des emplois et de l’espoir en lieu et place de la pauvreté. C’est pour cela que des hommes d’affaire américano-afghans, des représentants de la Chambre de commerce états-unienne et des responsables du Center for International Private Enterprise ont fondé la Chambre de commerce américano-afghane (AACC).
Le pays est encore miné par la pauvreté et des pratiques économiques marquées par le favoritisme et issues d’un autre temps. Il faut faire évoluer l’Afghanistan sur la bonne voie, comme les États-Unis l’ont fait pour l’Allemagne en 1945. C’est dans cet état d’esprit que le gouvernement d’Hamid Karzai conduit une politique de sécurité et de prospérité par l’ouverture des marchés, la mise en place de la libre concurrence, la défense de la propriété individuelle et la transparence. Dans un pays où demeurent des milices lourdement armées et où beaucoup d’Afghans ignorent tout du monde des affaires, l’aide viendra de la diaspora afghane, hautement diplômée et connaissant bien à la fois le pays et l’économie mondiale.
Il faut développer l’économie locale et se méfier de l’effet pervers de la présence de l’ONU, de la Banque mondiale, des aides fournies par les États-Unis et les autres pays donateurs et des ONG étrangères. En effet, ces organisations versent à certains Afghans des salaires relativement astronomiques et leur présence crée une bulle économique, qui disparaîtra quand ils partiront. Elle ne permet pas le développement de l’économie locale puisque cela fait trop augmenter les niveaux des salaires pour les entreprises afghanes.
Le gouvernement états-unien en coordination avec la Chambre de commerce états-unienne et l’AACC doivent soutenir la création d’entreprises privées en Afghanistan, ce qui permettra d’assurer la sécurité bien longtemps après le départ des troupes.
« Une nouvelle ligne Maginot »
Une nouvelle ligne Maginot
Libération (France)
[AUTEUR] Paul Quilès est député (PS) du Tarn. Il est membre titulaire de la délégation française à l’Assemblée parlementaire de l’OTAN et ancien ministre de la Défense (1985-1986).
[RESUME] En dehors des périodes de crise, le thème de la Défense n’intéresse pas grand monde en France et baigne dans un consensus composé de formules incantatoires brisé de temps à autres par des prises de position démagogiques. Lorsqu’une période de crise apparaît, il est trop tard et, depuis la fin de la Guerre froide, les crises sont nombreuses.
Ces crises répétées suscitées par l’unilatéralisme de l’hyperpuissance états-unienne, la mondialisation incontrôlée qui cause l’effondrement des États et l’érosion des systèmes internationaux, imposent un réexamen de notre politique de sécurité et de défense au niveau européen. Aujourd’hui, l’UE n’a pas les moyens militaires de ses ambitions diplomatiques et se fait grandement distancer par l’avance technologique de l’armée américaine. Les pays européens, à l’exception du Royaume-Uni et de la France, dépensent peu dans le domaine de la défense et surtout ne coordonnent pas leurs efforts, notamment dans le domaine du matériel par les différents pays. Il est donc nécessaire de concevoir un programme d’armement en commun.
Il faut également tenir compte des bouleversements du monde et diminuer nos dépenses nucléaires, utiles dans le contexte stratégique de la Guerre froide, mais plus aujourd’hui. La doctrine nucléaire française a été pensée comme une nouvelle ligne Maginot contre l’Union soviétique et doit donc se transformer. Les 20 % du budget militaire français qui lui sont consacrés doivent désormais servir à édifier une armée européenne qui pourra peser sur la scène internationale et assurer la paix dans les différentes parties du globe.
« Une maigre incitation à faire la paix »
Scant incentive to make peace
International Herald Tribune (États-Unis)
[AUTEUR] Uri Dromi est directeur pour l’aide internationale de l’Israel Democracy Institute de Jérusalem.
[RESUME] Suite à l’attentat de dimanche à Tel-Aviv, les autorités israéliennes ont décidé d’empêcher les représentants de l’autorité palestinienne de se rendre à la conférence de Londres, initiée par Tony Blair sur la réforme des institutions palestiniennes. C’était là une occasion de reprendre le dialogue, mais une attaque terroriste à détruit les bonnes intentions.
Il y a quelques temps, lors d’une autre conférence entre Israéliens et Palestiniens à Londres, le Dr. Eyad Sarraj défenseur des Droits de l’homme et psychiatre palestinien, avait convaincu l’ancien amiral israélien Ami Ayalon que le désespoir dans la population palestinienne est si grand que la plupart des enfants de Cisjordanie et de la bande de Gaza rêvent aujourd’hui d’être des martyrs se sacrifiant pour tuer des Israéliens. Quand Ayalon est rentré en Israël, il a commencé à agir pour que l’espoir soit rendu aux Palestiniens et pour leur démontrer qu’ils avaient beaucoup à gagner en suivant la voie de la paix.
Je partage l’analyse d’Ayalon, mais je pense que tant que Yasser Arafat sera au pouvoir, il empêchera toute solution pacifique et soutiendra le terrorisme. C’est pour cela que les Palestiniens doivent se rendre à Londres : cela permettra peut-être d’organiser la succession d’Arafat. Ils pourront alors rompre avec le terrorisme et, dans cette optique, ils trouveront des Israéliens avec lesquels s’entendre sur la voie de la paix.
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