« Comment Bush peut sortir du piège des inspections »

How Bush Can Avoid the Inspections Trap
New York Times (États-Unis)

[AUTEURS] Martin Indyk est ancien assistant sur les questions du Proche-Orient au secrétariat d’État états-unien et ancien ambassadeur en Israël sous l’administration Clinton. Il est directeur du Saban Center for Middle East Policy de la Brookings Institution et directeur exécutif du Washington Institute for Near East Policy. Kenneth M. Pollack est membre du Center for Foreign Policy Studies de la Brooking Institution et du Council on Foreign Relations. Il est ancien membre du National Security Council et ancien analyste militaire spécialisé sur les questions iranienne et irakienne à la CIA (1988-1995). Il est l’auteur de The Threatening Storm : The Case for Invading Iraq.

[RESUME] Les États-Unis sont tombés dans le piège des inspections. Paris et Berlin, aidés par Moscou et Pékin, vont tout faire pour que Washington ne puisse pas s’en sortir et laisse ainsi plus de temps à Hans Blix. George W. Bush se retrouve ainsi dans la même situation que Bill Clinton en 1998.
Déjà à l’époque, Saddam Hussein avait, au dernier moment, réussi à sauver sa place en feignant de collaborer après n’avoir pas respecté les résolutions du Conseil de sécurité. Il recommence aujourd’hui. Alors que la menace pour son régime se fait de plus en plus sentir, Saddam Hussein vient d’autoriser l’accès des inspecteurs à plus de sites, à plus de documents. Il a « encouragé » des scientifiques irakiens à parler seuls avec les inspecteurs et il a créé des équipes d’inspections irakiennes pour assister celle de l’ONU. Tout cela n’est que de la poudre aux yeux.
Aujourd’hui, Bush n’a le choix qu’entre deux solutions : agir seul, mais s’opposer ainsi à la communauté internationale et à une partie de son opinion publique, ou laisser faire Saddam Hussein. C’est pourquoi il doit demain dans son discours sur l’état de l’Union :
  Etre ferme sur le fait que la « collaboration » avec les inspecteurs et le fait de se conformer aux résolution de l’ONU sont deux choses différentes. Et que c’est le désarmement qui compte.
  Mettre à la disposition de tous les informations secrètes dont il dispose sur l’armement irakien.
  Donner un ultimatum à l’Irak pour qu’il abandonne son stock d’armes que nous savons en sa possession et être clair que s’il ne le fait pas, nous ferons la guerre.
En agissant ainsi, le président peut sortir du piège des inspections, mais il va devoir faire vite.

« L’axe de l’inconscience »

The axis of irrelevance
The Washington Times (États-Unis)

[AUTEUR] Oliver North est un chroniqueur régulier du Washington Times et il est fondateur et président d’honneur de la Freedom Alliance. Il a été un des hommes clefs de l’Irangate, notamment de l’organisation et du financement par l’argent de la drogue des Contras au Nicaragua.

[RESUME] Il y a un an, beaucoup avait critiqué la formule « Axe du Mal » utilisée par George W. Bush dans son discours sur l’état de l’Union. Pourtant, depuis ce discours, on a pu constater la pertinence de ce propos : la Corée du Nord a admis posséder des armes nucléaires, l’Iran intensifie son aide aux mouvements terroristes du Jihad islamique et du Hezbollah et l’Irak ment ouvertement aux inspecteurs en désarmement de l’ONU.
Cette année, peut-être aurons nous droit à la définition d’un nouvel axe : l’Axe de l’inconscience. Ces membres en sont :
  La France. Un pays que les États-Unis ont tant aidé au cours de ce siècle et qui est retombé dans la logique d’apaisement qui était celle du maréchal Pétain en décidant de compter sur la coopération irakienne.
  L’Allemagne. Le pays qui a le plus fait pour que Bagdad reconstitue son potentiel d’armes chimiques et biologiques et qui affirme aujourd’hui que Saddam Hussein s’est pleinement plié à la résolution 1441 de l’ONU.
  L’Union Européenne qui n’accepte pas la guerre sans accord de l’ONU.
  L’ONU qui, après avoir élu la Libye à la tête de sa commission des Droits de l’homme, continue de minimiser, par la voix d’Hans Blix, l’importance des preuves contre l’Irak.
Le jour du jugement approche pour l’Irak et l’ONU. Les Nations Unies vont bientôt devoir faire un choix. Tout comme la France et le Royaume-Uni ont dû choisir face à Hitler entre « la guerre ou le déshonneur » pour reprendre l’expression de Churchill. Il ne faudra pas alors oublier que la couardise mène également à la guerre.

« Nous sommes poussés au bulldozer vers la guerre »

We’re being bulldozed into war
The Observer (Royaume-Uni)

[AUTEUR] Charles Kennedy est le chef de file du Parti libéral démocrate du Royaume-Uni. Il est député à la Chambre des communes (Voir son site).

[RESUME] Hans Blix a déjà expliqué que son rapport aurait comme conclusion essentielle que les inspecteurs ont besoin de plus de temps pour mener à bien leur enquête. Il faut le soutenir car pour l’instant rien ne justifie une guerre.
Malgré cela, le quart de l’armée britannique est déjà dans le Golfe, de facto sous commandement états-unien. Cette situation tend nos relations avec nos voisins et partenaires européens, au premier rang desquels on trouve la France et l’Allemagne. Le gouvernement entretient la confusion en mélangeant dans son argumentation changement de régime et désarmement en Irak, tout ça sans débat à la Chambre des communes.
Le Parti libéral démocrate connaît le risque représenté par les armes de destruction massive et, à ce titre, nous ne sommes pas contre la guerre par principe. Nous voulons simplement que le rôle de l’ONU soit respecté et qu’un débat parlementaire ait lieu dans notre pays. Ce dernier permettrait d’éclairer les points obscurs qui demeurent sur une myriade de question, notamment sur le commandement militaire en Irak et sur l’occupation du pays après la guerre.

« Quand résisterons nous ? »

When will we resist ?
The Guardian (Royaume-Uni)

[AUTEUR] Edward Saïd est un essayiste palestinien et professeur à l’Université de Columbia à New-York (Son site).

[RESUME] Les États-Unis sont en train d’accumuler une force toujours plus impressionnante dans le Golfe alors que l’économie du pays décline. Une guerre incroyablement coûteuse se prépare dans l’indifférence de la population américaine qui ne s’étonne pas de la différence de traitement entre l’Irak et la Corée du Nord, tant depuis le 11 septembre le monde arabe est diabolisé.
Les politiciens, les experts, les dirigeants, les journalistes s’accordent tous aux États-Unis pour affirmer que l’Islam doit se réformer et que le système éducatif arabe financé par des alliés des États-Unis génère des terroristes et des fanatiques. Dans ce paysage, les seuls « bons » Arabes sont ceux qui viennent soutenir ce discours et critiquer leur culture dans les médias. Dans ce climat, tous les clichés sur le monde arabe sont vrais. Tout discours divergent est « irréaliste » et les Arabes sont priés de s’ouvrir à la modernité, à l’Occident, au libre marché et à la démocratie.
Le choc des civilisations que Bush fabrique pour couvrir ses ambitions hégémoniques sur le pétrole est censé aboutir au triomphe de la démocratie et de la modernisation à l’américaine. La guerre en Irak sera purificatrice et elle libèrera le peuple irakien qui pardonnera instantanément toutes ses souffrances passées. Dans le même temps, Ariel Sharon détruit, exil, casse, punit tout ce qu’il peut en Palestine, malgré les appels à la négociation de l’Autorité palestinienne.
Ce qui est le plus surprenant dans tout cela, c’est la passivité du monde arabe qui ne se révolte pas. La plus grande puissance de tous les temps veut redessiner la région à sa guise. Personne n’échappera au cataclysme et pourtant il n’y a pas de révolte. C’est toute une civilisation qui est aujourd’hui menacée par les Etats-Unis. Tout doit être entrepris pour sortir du scénario voulu par les États-Unis en réagissant à leur arrogance.

« M. le président, l’Afrique a besoin de nous »

Mr. President, Africa Needs Us
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Bono est le chanteur du groupe U2. Il est militant de la lutte contre le sida et pour l’annulation de la dette des pays du tiers-monde. Il a fondé l’association DATA (Debt, AIDS, Trade in Africa).

[RESUME] Aujourd’hui, en Afrique, 9500 personnes vont contracter le virus du sida et 6500 vont en mourir. Avant la fin de la décennie, il y aura 25 millions d’orphelins à cause du virus.
Quand demain, le président Bush fera son discours sur l’état de l’Union, il parlera surtout de l’Irak, de la Corée du Nord et du terrorisme, mais j’espère qu’il trouvera quelques minutes pour parler du sida et pour définir enfin une réponse de l’Amérique à cette crise. C’est vital pour l’Afrique et cela a également un impact sur la sécurité des États-Unis.
En effet, si les terroristes ont pu trouver un refuge en Afghanistan et préparer leurs attaques de ce pays en raison de la décrépitude dans laquelle il se trouvait, c’est dix Afghanistan qui seront peut-être demain en Afrique à cause du sida et du drame qu’il suscite dans certains pays. Si on veut éviter cela, il faut impérativement que les malades aient accès aux médicaments.
Le peuple américain que j’ai rencontré connaît ces faits et est prêt à faire les dépenses qui s’imposent pour lutter contre la maladie. Si les États-Unis investissent 2,5 milliards de dollars dans la lutte contre le sida , nous pouvons obtenir de grands résultats en sauvant la vie de trois millions de personnes par an et en empêchant la contamination de 30 millions de personnes. Il est temps que le gouvernement se montre aussi généreux que sa population.

« Peròn, Pinochet et la patience »

Perón, Pinochet and Patience
New York Times (États-Unis)

[AUTEURS] Jorge I. Dominguez et Steven Levitsky sont professeur d’analyse gouvernementale à Harvard.

[RESUME] Le Venezuela vit la crise la plus grave de son histoire démocratique depuis que l’opposition a déclenché une grève générale pour protester contre la politique du président Hugo Chavez. Il est vrai que ce dernier est aujourd’hui impopulaire, violent, autoritaire, qu’il ruine le pays et qu’il menace la démocratie, mais l’opposition ne s’y prend pas de la bonne façon pour le chasser du pouvoir.
En effet, vue la situation, même si l’opposition parvient à le faire démissionner ou à provoquer des élections anticipée, elle est trop divisée pour le battre. Même si elle gagnait la présidentielle, elle ne serait de toute façon pas en mesure de gouverner en raison de la mobilisation de la minorité de Vénézuéliens qui soutiennent leur président.
C’est pourquoi, l’opposition doit s’inspirer de l’histoire des pays voisins. Une stratégie identique à celle qu’elle mène aujourd’hui avait été utilisée par les opposants à Peròn en Argentine dans les années 50 et elle n’avait pas réussi à chasser définitivement le dictateur du pouvoir. En revanche, la stratégie fondée sur la patience et le respect de la constitution des démocrates chiliens contre Pinochet avait réussi. Il faut donc attendre le référendum d’août pour battre Chavez constitutionnellement et profiter du délai jusqu’à ce référendum pour accorder les différents mouvements d’opposition sur une candidature unique, en mesure de battre le président sortant.

[CONTEXTE] Sur la tentative de coup d’État organisée par Washington à Caracas, en avril dernier, voir notre enquête : « Opération manquée au Venezuela ».

« L’Inde, un allié naturel »

India, a natural ally
The Washington Times (États-Unis)

[AUTEUR] Larry Pressler est ancien sénateur Républicain du Dakota du Sud (1979-1997). Il a été président du sous-comité des affaires étrangères pour l’Asie du Sud au Sénat. Il a été rédacteur d’une loi visant à assurer l’équilibre nucléaire entre l’Inde et le Pakistan.

[RESUME] La paix et la sécurité ne seront pas assurées avec la fin de la guerre en Irak. Cette guerre aura un coût économique et génèrera une augmentation du terrorisme et de l’antiaméricanisme alors que la Chine et la Corée du Nord seront toujours des menaces. Aussi, il sera nécessaire d’entamer une action diplomatique dans la région et de déterminer qui sont nos vrais alliés.
L’Inde est notre allié car elle partage nos valeurs de démocratie, de Droit de l’homme et de liberté religieuse. De plus, le secteur du logiciel en Inde est florissant est bien intégré à l’économie globale. Il faut privilégier, dans la région, le régime démocratique indien et cesser d’écouter le complexe militaro-industriel qui, se moquant des Droits de l’homme, soutient le Pakistan, qui est pourtant une menace terroriste en suspens.
Il est important de repenser nos alliances dans la région et de signer avec New Delhi un accord commercial, auquel Israël pourra se lier par la suite. Il faut également réduire l’aide en direction d’Islamabad et exiger que le Pakistan cesse ses actions terroristes contre son voisin.
L’Inde est un allié indispensable pour les États-Unis dans la recherche de la sécurité dans le monde de l’après guerre.