« Souvenir douloureux, puissant optimisme »

Doloroso recuerdo, poderoso optimismo
El Peridióco (Espagne)

[AUTEUR] Nommé « Homme de l’année » 2001 par le magazine Time et considéré comme un héros aux États-Unis depuis les attentats du 11 septembre 2001, Rudolph W. Guiliani est l’ancien maire républicain de New York (1994-2002). Il est connu pour son application du principe de « tolérance zéro » dans sa ville. Il est fondateur et président du Conseil d’Administration de Guiliani Partners.

[RESUME] Nous n’avons pas passé un jour sans penser aux victimes des horreurs d’il y a deux ans. Mais même si les sentiments face à la cruauté sont douloureux, l’espoir et l’optimisme sont quand même présents. À l’horreur, les Américains ont répondu par le courage.
Il est essentiel de conserver une vision large pour éradiquer le terrorisme. Il faudra du temps et de la détermination, mais les États-Unis ne sont pas seuls dans cette lutte. Et même si des divergences ont pu apparaître concernant les méthodes, nous poursuivons le même objectif de paix durable.
L’allocution du président George W. Bush, neuf jours après les attentats, inaugurait une doctrine nouvelle selon laquelle devaient être combattus les auteurs des attaques comme leurs financiers ou leurs protecteurs. Deux des plus grandes menaces pour la paix, Saddam Hussein et les Talibans, ont été écartées ; la feuille de route en Israël a produit de grandes espérances ; et si la Libye a reconnu sa responsabilité dans les attentats de 1988 et 1989, ce n’est pas une coïncidence. Les actions actuelles servent d’exemples. D’autres nations (Philippines, Indonésie, Arabie Saoudite) reconnaissent pour la première fois qu’elles hébergent des terroristes et qu’elles sont prêtes à collaborer à leur démantèlement.
Deux ans est une courte période pour oublier la pire attaque que nous ayons connu. Mais le courage et l’amour que les Américains ont montré sont des gages d’espérance.

« La tête du serpent Al Qaïda a été coupée »

The Head of the Al Qaeda Snake Has Been Cut Off
Los Angeles Times (états-unis)

[AUTEUR] Concepteur d’une théorie originale des relations internationales qui affirme la prééminence de la géoéconomie sur la géopolitique, Edward N. Luttwak est membre du National Security Study Group du département de la Défense états-unien. Il est également membre du Center for Strategic and International Studies.

[RESUME] Ce n’était qu’il y a 24 mois et pourtant toute la période antérieure au 11 septembre apparaît comme une ère d’ignorance, voire d’innocence. Bien sûr beaucoup de choses que nous avons appris depuis les attentats n’ont pas une grande importance. Le numéro un d’Al Qaïda est toujours libre et vivant, caché dans un camp au Pakistan ou un village du Yémen, mais il ne dirige plus une organisation fonctionnelle.
Les attentats qui ont visé Riyad et Casablanca plutôt que des cibles états-uniennes ou européenne démontrent qu’Al Qaïda n’a plus les moyens de planifier et de financer ses opérations faute de camp d’entraînement et de bases sûres comme il en disposait en Afghanistan.
Quand les États-Unis ont attaqué l’Afghanistan, on a affirmé qu’ils se heurteraient aux mêmes difficultés que les Soviétiques, mais ils ont vaincus en trois semaines. On a ensuite affirmé qu’Al Qaïda allait se disperser dans les pays musulmans et être encore plus dangereux. En réalité, ce ne sont que les fragments d’Al Qaïda qui demeurent qui organisent des attaques sporadiques, mais ils sont incapables d’organiser une attaque ressemblant au 11 septembre. En outre, la tentative d’Al Qaïda de déclencher une guerre entre les musulmans et les « juifs et les croisés » n’a fonctionné que chez les extrémistes hétérodoxes et les salafistes-wahabites qui refusent le message de tolérance coranique vis-à-vis des chrétiens et des juifs. Au contraire, on a même assisté à une réaction des imams traditionnels contre ces groupes financés par l’Arabie saoudite.
D’ailleurs, le seul échec de la guerre au terrorisme est de ne pas avoir empêché l’Arabie saoudite de financer le terrorisme et les mosquées extrémistes.

« Depuis ce jour… »

Since that day…
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Tom Ridge est le secrétaire états-unien à la Sécurité de la Patrie (Homeland Security).

[RESUME] Aujourd’hui, nous nous souvenons des victimes d’il y a deux ans, et des actes de compassion et de patriotisme qui suivirent. Le désir d’ouvrir ses bras avec amour s’est, depuis ce jour, transformé en un soucis de protection. Cette nouvelle période de l’histoire américaine est marquée par une conscience des dangers qui nous menacent.
Par la coopération multilatérale, grâce à un État fédéral fort et à des partenaires locaux, à des analyses et des recherches plus justes, nous améliorons notre capacité à interrompre des actions terroristes et nous réduisons notre vulnérabilité.
Vingt-deux agences se sont réorganisées au sein du Département à la Sécurité de la Patrie ; 50 000 employés entraînés travaillent sans cesse dans les aéroports pour notre sécurité ; les 20 000 containers reçus tous les jours sont désormais inspectés ; les médicaments protégeant des attaques bio-terroristes sont en circulation dans tout le pays ; les informations qui étaient hier cloisonnées dans différentes agences sont aujourd’hui partagées. Ainsi, nous avons construit de hautes barrières face au terrorisme et des ponts solides entre chaque personne.
Beaucoup de choses restent à faire, mais en travaillant ensemble, nous continuerons à progresser et, en fin de compte, à prédominer.

« L’Amérique veut des accords commerciaux pour protéger l’environnement »

America wants trade agreements to protect the environment
The Independent (Royaume-Uni)

[AUTEUR] [Robert B. Zoellick] est le représentant des États-Unis en matière commerciale à l’OMC. Cette tribune est adaptée d’un discours prononcé sur les questions environnementales au sommet de Cancun.

[RESUME] Dans nos négociations sur le commerce, nous avons déjà atteint divers objectifs dans le domaine de l’environnement. Notre but est de renforcer le lien entre environnement et commerce. Les États-Unis ont invité les autres pays à suivre cette voie.
Par exemple, nous avons un accord avec cinq pays d’Amérique centrale qui concerne à la fois l’économie et l’environnement (oiseaux migratoires, préservation de la faune et de la flore, pollution marine). Nous espérons grâce à ce genre d’accord développer un réel mécanisme de coopération.
Nous allons faire avancer les négociations de Doha en les insérant dans ces processus prenant en compte l’environnement. Nous allons mettre à disposition un registre fédéral afin d’écouter les commentaires de tous concernant cette question.

« Deux 11 septembre, une histoire »

Two 9/11s, one story
The Guardian (Royaume-Uni)

[AUTEUR] Roger Burbach est l’auteur de The Pinochet Affair : State Terrorism and Global Justice.

[RESUME] Le 11 septembre, j’ai vu passé l’avion au-dessus de moi, puis j’ai entendu des explosions et des milliers de personnes ont péris, dont deux de mes bons amis. Je ne parle pas du 11 septembre 2001 à New York, je parle de 1973 au Chili. Ces deux dates sont liées par bien des points communs.
Le 11 septembre 1973, Richard Nixon, Henry Kissinger et la CIA parvenaient enfin à renverser Salvador Allende grâce à un coup d’État conduit par le général Augusto Pinochet. Avant le 11 septembre 2001, l’attaque terroriste la plus sensationnelle menée par des étrangers aux États-Unis l’avait été en 1976 par l’opération Condor contre Orlando Letelier, un opposant à Pinochet. L’opération Condor est le premier réseau terroriste international en Occident et regroupait les services secrets de six pays d’Amérique latine autour de la police secrète de Pinochet et peut-être avec la complicité de la CIA. Ce réseau agit jusqu’au début des années 80. La constitution de ce groupe rappelle par de nombreux points la constitution d’Al Qaïda, groupe qui fut également aidé par la CIA pour combattre les Soviétiques en Afghanistan.
Plutôt que de tirer les enseignements du passé, les anciens responsables du gouvernement états-unien et certains conservateurs préfèrent réécrire cette sordide histoire et affirmer que c’est le contrôle excessif dont souffriraient les services de renseignements états-uniens qui ont permis aux groupes terroristes de prospérer. George Bush père a montré du doigt Bill Clinton, l’accusant d’avoir sapé le travail des services de renseignement en les empêchant de mener des opérations impliquant la torture ou les escadrons de la mort.
Aujourd’hui, les États-Unis répandent les carnages et la guerre, violent les Droits de l’homme et les libertés civiles. Cela provoque l’instabilité en Irak et en Afghanistan et la guerre au terrorisme est un échec. Face à cette situation, des hommes épris de droits se regroupent. Les deux 11 septembre ont fait émerger deux camps, une clique arrogante aux États-Unis qui s’engage dans le terrorisme d’État et les violations des Droits de l’homme et un camp qui défend ces droits et la loi. C’est dans cette lutte entre les deux camps que se dessine la globalisation.

« Les séquelles d’un rêve anéanti : " plus jamais ça " »

The Legacy of a crushed dream : « never again »
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] Ricardo Lagos est président du Chili.

[RESUME] Il y a trente ans, le Chili avait son propre 11 Septembre. Un bâtiment emblématique, le palais présidentiel de la Moneda était détruit. Le président Salvador Allende se donna la mort et marqua ainsi les consciences du monde entier.
Chaque pays se construit par son histoire et les Chiliens veulent la vérité sur leur passé. « Plus jamais ça » est sur les lèvres de tous. Le coup d’État et ses dramatiques conséquences ont ému car Salvador Allende représentait, en pleine Guerre froide, un espoir nourri de justice sociale et d’anticolonialisme. Mais l’expérience s’est finie dans la tragédie. Et après le 11 septembre, l’horreur se répandit et beaucoup d’autres pays accueillerent les Chiliens en fuite. Nous ne les remercieront jamais assez.
Aujourd’hui, le Chili est un nouveau pays. Il y a 15 ans, les partis politiques formaient la Concertation pour la Démocratie pour refuser la dictature. Maintenant, les forces armées sont intégrées à la démocratie. Nous pouvons regarder trente ans derrière nous avec des yeux différents.
Nous ne voulons pas d’une organisation mondiale à deux vitesses. C’est pourquoi nous défendons l’idée de mise en place de nouvelles normes adaptées aux réalités mondiales contemporaines. Le Chili est prêt à coopérer à cet effort international.

« Les esclaves de l’argent - et notre rébellion »

The slaves of money -and our rebellion
The Guardian (Royaume-Uni)

[AUTEUR] Le sous-commandant Marcos est le porte-parole du Mouvement zapatiste, qui lutte pour les droits des indiens du Mexique. Ce message est une déclaration faite au sommet anti-globalisation en parallèle du sommet de Cancun de l’OMC.

[RESUME] Frères et sœurs du Mexique et du monde, c’est un honneur pour nous de voir la mobilisation contre le néo-libéralisme à Cancun. Aujourd’hui est un des grands moments de ce mouvement qui refuse la mondialisation de mort et de destruction. La différence entre nous et ces esclaves de l’argent n’est pas dans la poche, mais dans les cœurs. Ils veulent répéter le passé, nous voulons construire le futur ; nous avons l’espoir et la liberté, ils ont la mort et l’esclavage. Ce n’est pas la première fois (ni la dernière) que des personnes se pensent propriétaires de la planète, cachées derrière leur pathétique sécurité et leurs murs.
Ils sont en guerre contre l’humanité. La globalisation est une machine qui mange du sang et défèque des dollars. Cette équation complexe qui transforme la mort en argent crée une zone exclusive de luxe. Nous n’avons aucune raison d’obéir et d’accepter. Construire une alternative, faite de dignité et de liberté, est nécessaire car de cela dépend l’avenir de l’humanité.
Des gens savent que la liberté est un mot souvent utilisé comme une excuse cynique. Il y a ceux qui mondialisent le conformisme, la stupidité et la guerre, et ceux qui essayent de mondialiser la rébellion, l’espoir, la vie et la mémoire, la liberté et la justice, la créativité et l’imagination. Nous espérons que le train de mort de l’OMC va dérailler à Cancun et partout ailleurs.

« La Révolution sioniste est morte »

La Révolution sioniste est morte
Le Monde (France)

[AUTEUR] Avraham Burg député du Parti travailliste israélien, est ancien président de la Knesset (1999-2003), et ancien président de l’Agence juive.

[RESUME] Le sionisme est mort et ses agresseurs sont au gouvernement. Les deux piliers de la révolution sioniste, la justice et la morale civique, ont disparus. L’opposition s’est évanouie, la coalition se tait ; seuls nos échecs sont retentissants. Le peuple juif n’a pas survécu pour inventer des armes sophistiquées et des systèmes d’irrigation perfectionnés mais pour devenir la « lumière des nations », nous avons échoué.
Rien n’est plus séduisant que d’être sioniste à Beth El ou Ofra. Mais qui va se soucier de ce que subit l’Arabe humilié et méprisé à un kilomètre de là ? Cela ne peut pas durer. Vous dansez sur un toit reposant sur des piliers qui chancellent !
Même si on tuait mille terroristes par jour, rien ne changerait. Mais il y a une autre option : le Premier ministre doit dire au peuple que le temps des illusions est dépassé, les Arabes doivent être pris en compte. Sans égalité, une démocratie n’est pas possible. Vous voulez la totalité du territoire ? Vous aurez le ghetto Kalkilya et le goulag Jenine. Soit vous renoncez au rêve d’Israël, soit vous octroyez la citoyenneté à tous. Telles sont les alternatives réelles : discrimination ethnique ou démocratie.
Mais il n’y a pas de Premier ministre à Jérusalem. La droiture irréprochable des anciens dirigeants (Ben Gourion, Shamir ou Begin) n’existe plus. La majorité le sait, mais accorde quand même sa confiance politique. Le modèle négatif d’identification et la brutalité envers les occupés empêchent la paix et la loi d’exister.
Les forces du Bien perdent espoir et nous laissent face à un sionisme discriminant, inégalitaire, corrompu et spoliateur. L’option sioniste authentique comporte une frontière incontestée, un plan social global et la fin de la corruption. On ne peut plus se contenter d’une alternative politique au gouvernement Sharon, il faut une alternative d’espérance à la mise en ruine du sionisme.