En février 1992, cinq ans après que j’ai quitté le Sénat, j’avais été approché à Athènes par un « attaché naval » de l’ambassade libyenne, sans aucun doute lié aux services de renseignement de son pays. Jugeant que je n’étais pas la personne adéquate pour servir d’intermédiaire avec la première administration Bush, j’avais prévenu le département d’État du contact. On m’avait répondu qu’aucune discussion n’aurait lieu avec la Libye tant qu’elle ne livrerait pas les poseurs de bombe du vol de la Pan Am. Je transmettais cette réponse aux Libyens et ils me répondirent qu’ils étaient prêts à analyser cette éventualité.
Après trois jours de discussions à Genève, en mars 1992, les Libyens acceptèrent de livrer les deux suspects si l’administration Bush s’engageait à reprendre les discussions sur la levée des sanctions économiques et la normalisation des relations avec les États-Unis. Les responsables du département d’État me déclarèrent qu’ils ne considéraient pas cette offre comme sérieuse, mais Tripoli insista et il fut alors convenu que les suspects de l’attentat seraient amenés à Genève d’où ils seraient ensuite transférés par un avion états-unien ou des Nations unies vers New York ou Londres. L’administration Bush refusa à nouveau cette offre en prétextant que si les deux suspects arrivaient en Suisse, ils tomberaient sous le coup de la juridiction helvétique et ne seraient pas forcément extradés.
Ce manque d’intérêt pour les négociations s’explique sans doute par le fait que les Américains ne voulaient pas discuter avec la Libye, quelles que soient les conditions. Les discussions reprirent à Tripoli, mais les États-Unis ne voulaient toujours rien entendre. Cette histoire prouve que nous aurions pu normaliser nos relations avec la Libye depuis longtemps et que les mouvements récents n’ont rien à voir avec la guerre en Irak.

Source
Washington Post (États-Unis)
Quotidien états-unien de référence, racheté en août 2013 par Jeff Bezos, fondateur d’Amazon.

« My Secret Talks With Libya, And Why They Went Nowhere », par Gary Hart, Washington Post, 18 janvier 2004.