Londres a affirmé souhaiter que l’Iran intervienne en Irak pour calmer les chiites et pour construire un soutien plus fort au gouvernement intérimaire irakien. Ce souhait peut paraître troublant pour les États-uniens accoutumés à entendre présenter ce pays comme un membre de l’« Axe du mal », mais ça ne serait pourtant pas la première fois que Téhéran vient en aide aux États-Unis dans sa guerre au terrorisme.
En Afghanistan, la guerre pour renverser les Talibans n’a pas commencé en 2001, mais avant et elle rassemblait contre le régime en place à Kaboul une coalition regroupant l’Iran, la Russie, l’Inde et l’Alliance du Nord. Après le 11 septembre, ces pays furent rejoints par les États-Unis dont la puissance aérienne permit de dégager la route de l’Alliance du nord jusqu’à Kaboul. À la conférence de Bonn sur l’organisation de l’avenir de l’Afghanistan, les différentes factions afghanes furent rassemblées autour des États-Unis et des autres pays de la coalition qui avait participé à la chute des Talibans.
À cette occasion, j’ai pu assisté par deux fois à des actions décisives de l’Iran pour favoriser la reconstruction du pays : c’est Téhéran qui insista pour que les mots « démocratie » et « guerre au terrorisme » apparaissent dans le texte final. C’est également l’Iran qui parvint à convaincre l’Alliance du Nord de faire des compromis sur le nombre de ministères qui lui était alloué. Plus tard, l’Iran utilisa également toute son influence pour faire accepter Hamid Karzaï aux seigneurs de la guerre récalcitrants. En offrant 500 millions de dollars pour la reconstruction à la conférence de Tokyo, ce pays devint le premier donateur parmi les voisins de l’Afghanistan. L’Iran a également aidé à la constitution d’une armée national afghane.
En dépit des efforts iraniens, l’Iran fut le seul pays à ne pas être remercié par Colin Powell après la conférence de Bonn. Les contacts avec Téhéran restent très limités. Bien sûr, il existe dans ce pays une frange dure qui soutient le Hamas, veut constituer un programme nucléaire et refuse de livrer les agents d’Al Qaïda, mais nous devons nous souvenir que nous n’avons pas hésité à demander l’aide de Tudjman et de Milosevic pour remettre la Bosnie sur pied. Nous pouvons demander l’aide de l’Iran pour reconstruire l’Irak.

Source
Washington Post (États-Unis)
Quotidien états-unien de référence, racheté en août 2013 par Jeff Bezos, fondateur d’Amazon.

« Time to Deal With Iran », par James Dobbins, Washington Post, 6 mai 2004.