Au sommet de Guadalajara, l’Union européenne a parlé d’une seule voix pour 25 États. Cela a été rendu possible grâce à un projet historique et une vision commune du continent que les différents pays européens partagent. Face à cet exemple, il faut nous demander si l’Amérique latine et les Caraïbes ont la volonté de devenir une région unie afin de parvenir à des avancées tangibles pour nos peuples.
La fin du XXème siècle a vu la démocratisation du continent et la fin des régimes autoritaires. Cela a permis la création d’un mécanisme de coopération et de consultation politique permanente, le groupe de Rio. Mais la démocratie ne nous a pas apporté la croissance avec équité ou l’élimination de la pauvreté. Beaucoup ont alors pris le dénommé Consensus de Washington comme l’outil magique qui résoudrait nos problèmes. Nous avons ouvert nos économies, privatisé les entreprises d’État, cherché à mettre de l’ordre dans la macroéconomie et les comptes fiscaux. Cela était nécessaire, mais il fallait également accompagner ces mesures d’actions ne faisant pas partie du Consensus de Washington : des politiques en faveur des plus pauvres. Or, dans cette période de globalisation, ces programmes doivent prendre place à l’échelle continentale.
Le Mercosur offre une possibilité de travailler sur d’autres sujets que des tarifs douaniers, le Chili l’a compris et y travaille. C’est dans cette optique qu’il faut comprendre notre proposition de déployer essentiellement des troupes sud-américaines pour régler la crise en Haïti.
Le Chili et le Mexique sont les deux pays qui ont le plus d’accords de libre-échange au monde, mais nous ne faisons pas de confusion entre le commerce et la politique. Notre position au Conseil de sécurité en 2003 l’a montré. Nous savons toutefois que notre action est inutile sans la coopération des autres pays et nous voulons donc la développer comme nous voulons développer le multilatéralisme.

Source
Clarin (Argentine)

« Urgencia de un proyecto común », par Ricardo Lagos, Clarin, 14 juin 2004.