Les enquêtes Hutton et Butler étaient directement concernées par la saga irakienne, mais leurs centres d’intérêts étaient plus larges et leurs rapports donnent des informations significatives sur le fonctionnement des gouvernements modernes.
Le rapport Butler a montré l’importance des relations informelles au 10 Downing Street et la nature des relations entre le monde du renseignement et le Premier ministre, et l’autorité de ce dernier sur les membres du gouvernement. Cela est dû à des facteurs propres à Tony Blair. Quand, comme ce fut le cas en 1997, on assiste à un changement de majorité pour la première fois après une longue période, il n’est pas rare que le nouveau gouvernement craigne que les fonctionnaires mis en place par ses prédécesseurs n’acceptent pas le nouvel agenda politique. En outre, Blair est le premier Premier ministre depuis 1924 à occuper ces fonctions sans avoir jamais eu de responsabilité ministérielle et ne disposant donc d’aucune expérience à ce niveau. Ces deux éléments l’ont poussé à transformer le fonctionnement traditionnel des gouvernements britanniques, et à avoir un comportement très centralisateur et peu respectueux des fonctions de chacun. Tous les membres du gouvernement sont des ressources mobilisables par le pouvoir central dans les différents dossiers.
Cette situation empêche d’identifier clairement les chaînes de responsabilité et le Parlement a perdu une bonne partie de son pouvoir de contrôle. Si les institutions fonctionnent mal, le gouvernement a le droit et le devoir de les transformer, mais il a également le devoir de les laisser en état de fonctionnement convenable. Or, avec Blair, nous n’avons jamais été aussi près d’une dictature élective.

Source
The Guardian (Royaume-Uni)

« Blair has taken us towards an elective dictatorship », par Michael Quinlan, The Guardian, 22 octobre 2004.