Tendances et événements au Liban

Le Liban est de nouveau plongé dans une phase de fortes tensions politiques et d’inquiétudes sécuritaires après l’assassinat, mercredi matin, du directeur des opérations de l’Armée libanaise, le général François Hajj. Tué dans un attentat à la voiture piégée, le général Hage était pressenti pour succéder au général Michel Sleimane au commandement suprême de l’armée au cas où ce dernier était élu président de la République. Le général Hajj était connu pour ses positions anti-israéliennes. À la fin des années 70, alors qu’il était encore tout jeune officier, il avait refusé de collaborer avec la milice supplétive d’Israël, au Liban-Sud. Après la destruction de sa voiture dans un attentat, il avait fuit son village natal de Rmeich, à la frontière avec la Galilée, et n’y était retourné qu’après la libération du Sud, en 2000. Le général Hajj avait aussi combattu sous les ordres du général Michel Aoun entre 1988 et 1990, d’abord contre l’armée syrienne, ensuite contre la milice des Forces libanaises, dirigée par Samir Geagea. Il est aussi le principal artisan de la victoire de l’Armée libanaise contre les intégristes sunnites de Fatah al-Islam, dans le camp de Nahr al-Bared, après une guerre qui a duré du 20 mai au 2 septembre, et qui a fait 170 morts dans les rangs de la troupe. Ce premier attentat contre un aussi haut gradé de l’armée ouvre de sombres perspectives pour le Liban, surtout que l’armée reste la seule institution unie du pays.
Cette brèche sécuritaire intervient alors que la coalition au pouvoir du 14-mars a haussé le ton et menacé de recourir à l’élection d’un président issue de ses rangs à la majorité simple. Mais des analyses de presse affirment que le refrain de l’élection à la majorité simple n’est pas la véritable mesure envisagée dans les coulisses du 14-mars. Le gouvernement de la coalition au pouvoir, dirigé par Fouad Siniora, veut en fait exercer pleinement les prérogatives de la présidence de la République, vacante depuis le 24 novembre dernier, en commençant par nommer des ministres à la place de ceux de l’opposition qui ont démissionné depuis le 11 novembre 2006.
L’opposition a réaffirmé son attachement à ses fondamentaux concernant l’échéance présidentielle. Elle a réitéré son appel à un accord politique global permettant au nouveau mandat de démarrer dans des conditions maximales, juste après l’élection du général Michel Sleimane à la présidence. Des sources de l’opposition estiment que la reprise des attentats ne peut pas être séparée de l’escalade politique et verbale initiée par le 14-mars au lendemain du retour d’une visite éclair de Saad Hariri en Arabie saoudite. Le but étant de couvrir un plan du gouvernement Siniora visant à mettre la main sur l’État et à refuser le partage du pouvoir avec l’opposition.
Selon un de ses dirigeants, l’opposition est déterminée à faire face vigoureusement au sabotage sécuritaire et constitutionnel entrepris par le 14-mars. Ses instances dirigeantes ont examiné, dans la nuit de mardi à mercredi, toutes les options, y compris la possibilité de l’entente. Mais elle se tient prête à faire payer le prix fort à ceux qui préfèrent déstabiliser le pays plutôt que de partager le pouvoir. Elle estime que l’attaque contre l’armée, principale garante de la sécurité, est une ligne rouge qui personne ne peut franchir. La nouvelle stratégie du 14-mars et de ceux qui tirent ses ficelles est la suivante : imposer à l’opposition un mandat Sleimane vidé de son sens, ou perpétuer le vide sous la gestion du gouvernement illégitime et anticonstitutionnel de Fouad Siniora. Aucune de ces deux options ne passera.

Presse libanaise

AS-SAFIR (QUOTIDIEN PROCHE DE L’OPPOSITION)
Le candidat proposé pour combler le vide présidentiel (Le général Michel Sleimane, ndlr) jouit d’une unanimité locale, régionale et internationale. D’où viennent alors les complications ? Personne ne possède une réponse claire à cette question. Mais en observant l’attitude de capitales régionales et internationales concernées par le Liban, on se rend compte que le soutien au consensus au Liban reste fort et stable. Certaines sources ont même révélé que l’échec des Libanais à s’entendre commence à avoir une influence négative sur le rapprochement amorcé entre certains pays arabes.

AL-AKHBAR (QUOTIDIEN PROCHE DE L’OPPOSITION)
La tension sur plusieurs axes régionaux commence à se traduire, au Liban, par une escalade sans précédent de la part du 14-mars qui se dirige vers des mesures visant à renflouer le cabinet Siniora. Pendant ce temps, l’Arabie saoudite, l’Égypte et la France ont accentué leurs pressions sur la Syrie pour la convaincre de contraindre l’opposition libanaise de faciliter l’élection présidentielle et remettre à plus tard les négociations autour des autres dossiers.

Tendances et événements au Proche-Orient

Les contacts en vue de relancer le dialogue inter-palestinien avancent très lentement conformément aux instructions données par les États-Unis aux pays membres du groupe de Charm el-Cheikh. Washington veut attendre les résultats de la tournée au Moyen-Orient du président états-unien, début 2008, avant de donner à ses alliés ses directives finales. George Bush veut tenter de réactiver la conférence d’Annapolis, bien que la plupart des observateurs qualifient de mort-née cette manifestation de relations publiques.
Pendant ce temps, en Cisjordanie et à Gaza, la confrontation bat son plein entre les mouvements de résistance et l’armée d’occupation israélienne. Tous les jours, un grand nombre de Palestiniens, des civils en majorité, tombent sous les balles israéliennes. Et le blocus implacable imposé à plus d’un million de personne se poursuit.
Alors que des contacts timides ont lieu entre les différentes organisations palestiniennes, la situation bouge à l’intérieur du Fatah de Mahmoud Abbas. Des voix s’élèvent pour réclamer que la priorité soit donnée à l’unité nationale palestinienne et non pas à la coopération avec les Israéliens. Le président de l’Autorité a dû personnellement intervenir pour empêcher un groupe de hauts cadres du Fatah d’exprimer publiquement des critiques contre le Premier ministre Salam Fayyad, considéré comme l’homme fort des États-Unis dans les Territoires palestiniens autonomes.

Agences et presse internationales

GULF NEWS (QUOTIDIEN ÉMIRATI)
 Douryed El-Bayek
Ces forces qui jouent avec le feu dans un Liban instable, comme un éternel recommencement de l’avant-guerre civile, dans un élan de colère et de désespoir son irresponsables. Le Liban est de retour à la case départ. Le peuple libanais, optimiste quant à la conclusion d’un règlement après un accord consensuel sur le généra Sleimane, doit à nouveau vivre sans espoir dans l’avenir, grâce aux dinosaures politiques qui ont prouvé une fois de plus qu’ils ne soucient ni de la stabilité du pays et ni de la paix pour leur peuple. Les leaders, qui faisaient la navette d’une réunion à une autre dans le bazar politique de Beyrouth le mois dernier, n’ont laissé aucun doute sur le fait que leur principal intérêt était leurs rêves personnels au détriment de leurs innocentes personnes. A cause de la façon dont ils manient une question importante comme l’élection d’un nouveau président, l’avenir du pays est en péril, et personne ne semble savoir quand est-ce que la situation sera hors de contrôle, comme en 1975.
Comme l’a souligné à juste titre le Secrétaire général des Nations unies, chacun des dirigeants qui a été impliqué d’une manière ou d’une autre dans la guerre civile de 1975-1990 n’a pas la qualité d’homme d’État, parce qu’ils ne se préoccupent pas de jouer avec des allumettes inflammables dans leur pays. Certains Libanais mettent la faute de l’impasse actuelle sur l’ingérence des puissances étrangères, mais le huitième report de la séance parlementaire prouve sans aucun doute que les Libanais devraient d’abord accuser leurs propres dirigeants. Oui, la vente aux enchères qui se tiendra au Liban pour le poste de président est un bazar, et les négociations qui se déroulent dans ce bazar n’est pas meilleure que dans n’importe quel bazar oriental. L’incapacité de ses membres à convoquer le Parlement afin d’élire un nouveau président doit être prise au sérieux. C’est un signe que Lahoud pourrait être le dernier président de la seconde République du Liban créé à la suite de l’Accord de Taëf de 1989, et tout peut se produire à l’avenir, y compris une autre guerre civile dévastatrice dans ce petit pays.

AL-BAYAN (QUOTIDIEN QATARI)
Annapolis entre aujourd’hui dans la salle d’examen. La première réunion israélo-palestinienne depuis la conférence doit lancer les négociations sur le statut final. Neuf comités formés d’experts des deux bords commencent à étudier les divergences concernant les questions clé (Jérusalem, réfugiés, frontières et eaux). Israël tente de répandre un climat d’optimisme, mais la partie palestinienne vient à la table de négociations avec méfiance et prudence. Elle craint que le même scénario du passé se reproduise. Ses angoisses sont justifiées, car ce qu’a fait le gouvernement Olmert conformément à son interprétation d’Annapolis ne présage rien de bon.

• Dans un article publié dans la presse arabe, Ned Parker estime que l’augmentation des effectifs des GI’s en Irak a contribué à réduire la violence mais n’a pas réussi à améliorer la coopération entre les diverses factions irakiennes. Le pays semble aujourd’hui davantage balkanisé sur les plans ethnique et confessionnel. Dans le Sud, les milices chiites se livrent une guerre pour contrôler les ressources pétrolières. A l’Ouest, plus particulièrement dans la province d’Al-Anbar, les Arabes sunnites coopèrent avec l’armée américaine pour sécuriser et pacifier les routes et les autoroutes menant en Jordanie et en Syrie. Dans le Nord, Kurdes, Arabes et Turcomènes se disputent les régions de Mossul et de Kirkouk. La situation n’est guère meilleure à Bagdad où d’immenses murs de séparation sont érigés entre les quartiers, dont certains sont protégés par les milices sunnites et d’autres par des groupes chiites.

LE MONDE (QUOTIDIEN FRANçAIS)
Un comité interministériel se réunira le 17 décembre pour étudier la possibilité d’accorder le droit d’asile à des réfugiés irakiens, conformément aux promesses de Bernard Kouchner. Le gouvernement refuse d’indiquer le nombre de personnes qui pourrait être concernées, mais souligne que l’acceuil ne saurait se limiter aux seuls chaldéens, la République ne faisant pas de tri à caractère religieux.

LE FIGARO (QUOTIDIEN FRANçAIS, MAJORITÉ PRÉSIDENTIELLE)
Dans un entretien à paraître jeudi dans Le Nouvel Observateur, Nicolas Sarkozy affirme qu’un danger de guerre existe avec l’Iran. « Je n’ai jamais été pour la guerre. Le problème pour nous, ce n’est pas tant le risque que les Américains se lancent dans une intervention militaire, mais que les Israéliens considèrent que leur sécurité est vraiment menacée »
Quant à la Syrie, autre dossier épineux pour la diplomatie occidentale, le président Sarkozy se dit également « prêt à se rendre à Damas » s’il y a une élection présidentielle « de consensus » au Liban et « si les assassinats s’arrêtent ».

LA CROIX (QUOTIDIEN FRANçAIS, CATHOLIQUE)
 Entretien avec Saeb Erakat, Négociateur en chef de la délégation palestinienne à Annapolis
Dans la déclaration commune que nous avons signée à Annapolis, les Israéliens ont approuvé le gel de toute activité de colonisation y compris la « croissance naturelle », mais la semaine dernière, ils ont annoncé la construction de 307 nouveaux logements dans la colonie de Har Homa dans Jérusalem-Est occupée. Cela atteint la crédibilité de leur engagements.
Si nous ne parvenons pas à un accord en 2008 pour la reconnaissance d’un État palestinien, si les Israéliens veulent appeler « Israël » tout le territoire qui se trouve entre la vallée du Jourdain et la mer Méditerranée, alors ma bataille deviendra celle de l’égalité des droits : « Un homme, une voix ».

LE PARISIEN-AUJOURD’HUI EN FRANCE (QUOTIDIEN POPULAIRE)
 Entretien avec Mathieu Guidère, auteur du livre « Al-Qaïda à la conquête du Maghreb »
Il n’y a aucun doute sur l’attribution des attentats d’hier à Alger. Pour trois raisons. D’abord, à cause de la date fétiche des qaïdistes : le 11. Ensuite, à cause du lieu à Alger, considéré comme le quartier des Occidentaux. Enfin, à cause du mode opératoire : les attentats simultanés à bord de véhicules piégés. Tout cela porte la signature d’Al-Qaïda.
Depuis le 11 septembre 2001, le « 11 » c’est le chiffre de la baraka comme ils disent. C’est un fétichisme d’un nouveau genre et Al-Qaïda au Maghreb ne déroge pas à la règle terroriste : elle met un point d’honneur, depuis sa création il y a un an, à perpétrer des attentats meurtriers le 11 de chaque mois.

Audiovisuel international

AL-JAZEERA (CHAINE QATARI)
Principal journal du soir
 Mahmoud Ahmadinejad, président de la République islamique d’Iran
Le rapport des agences états-uniennes sur l’Iran constitue un pas en avant. Téhéran fera preuve de plus de positivisme si Washington prend des mesures supplémentaires.
L’Iran va poursuivre son programme nucléaire et il n’y a pas d’obstacles sérieux qui peuvent l’en empêcher. Tout le monde sait pertinemment que son programme est civil et pacifique.
Il n’y a pas de justifications pour que certains agissent, d’une manière illégale, contre le programme nucléaire iranien. Ceux qui tenteraient d’agir contre notre programme seront les perdants.

Tendances est un bulletin quotidien de veille politique sur le Proche-Orient, réalisé par l’agence New Orient News à Beyrouth. Retrouvez-le sur Voltairenet.org, en versions allemande, arabe, anglaise, espagnole et française. Consultez également Indicators, le bulletin quotidien de veille économique sur le Proche-Orient, disponible en versions anglaise, espagnole et arabe.