« Même une superpuissance a besoin d’aide »

Even a Superpower Needs Help
New York Times (États-Unis)

[AUTEUR] Chas W. Freeman Jr est l’ancien ambassadeur des États-Unis en Arabie saoudite (1989-1992) et vice-secrétaire à la défense (1993-1994). Il est président du Middle East Policy Council.

[RESUME] Il y a douze ans, Riyadh, visée par les Scuds irakiens, abritait les centres de commandement des coalitions occidentales et arabes, dirigées par les États-Unis et l’Arabie saoudite. Aujourd’hui, signe des temps, la capitale saoudienne est calme.
Pour beaucoup, la Guerre du Golfe est l’heure de gloire des États-Unis qui, alors, dirigaient une large coalition pour libérer un pays au nom de l’ONU. En revanche, la guerre à venir est une catastrophe dont personne ne croit qu’elle a pour but de restaurer l’autorité du Conseil de sécurité. Les Saoudiens ne croient pas que Saddam Hussein, aussi détestable soit-il, représente une menace, mais ils craignent que Washington, par sa politique irakienne, ne le pousse à jouer les poseurs de bombe suicide en ne lui laissant aucune porte de sortie.
Ici, tout le monde estime que les preuves de Colin Powell au Conseil de sécurité ne sont que l’image des restes pathétiques d’une armée anciennement puissante. Tout ce que les Saoudiens espèrent de cette guerre, c’est qu’elle entraînera le départ des troupes américaines de leur sol quand elle sera finie. Les dirigeants saoudiens veulent pour leur part une restauration des anciennes relations avec les États-Unis et ils vont donc autoriser l’utilisation de leurs bases aériennes dans la guerre, mais ce sera tout.
L’Arabie saoudite n’est pas le seul pays dans le monde qui aurait pu fournir une aide plus importante, c’est le cas de la plupart des alliés traditionnels des États-Unis. C’est une façon de critiquer le peu de cas que l’administration Bush fait de leur avis. Pendant cinquante ans, les États-Unis ont pu intervenir n’importe où dans le monde parce qu’ils pouvaient s’appuyer sur des alliés partout. Même aujourd’hui où leur puissance est inégalée, ces alliances restent une composante majeure de leur pouvoir. L’opposition mondiale à la guerre a un effet désastreux sur l’influence et le prestige des États-Unis alors même que cette guerre est menée pour renforcer l’hégémonie américaine.

« L’"age du Nord-est asiatique" approche »

The ’age of North-east Asia’ is approaching
The Independant (Royaume-Uni)

[AUTEUR] Roh Moo Hyun est président récemment élu de la Corée du Sud. Cette tribune est extraite du discours inaugural de sa présidence devant l’Assemblée nationale sud-coréenne.

[RESUME] Pendant des siècles, la nation coréenne a été entourée par de grandes puissances, mais a su préserver sa culture et son orgueil national. En cinquante ans, notre pays a su devenir la douzième puissance économique mondiale. Aujourd’hui, nous nous trouvons à un tournant et nous devons choisir entre la paix ou la tension. Il nous faut choisir le dialogue et la Corée du Nord doit abandonner son programme nucléaire car elle peut obtenir beaucoup en y renonçant.
Alors que la situation économique mondiale se détériore, notre pays a besoin d’une nouvelle période de croissance, mais il se trouve précisément dans une situation géopolitique favorable. En effet, nous allons entrer dans l’âge du Nord-Est asiatique, une région qui est restée longtemps à la périphérie de la modernité, mais qui apparaîtra bientôt comme une nouvelle source d’énergie pour l’économie mondiale. La péninsule coréenne est au cœur de cette région et est au carrefour de la Chine et du Japon. Cette situation, ancienne cause de désagréments historiques, est aujourd’hui une formidable opportunité.

« Elle aura lieu »

Elle aura lieu
Le Figaro (France)

[AUTEUR] Daniel Bensaïd est philosophe et membre de la Ligue communiste révolutionnaire.

[RESUME] Pour le Pentagone et la Maison-Blanche, les manifestants du 15 février doivent apparaître comme dix millions de membres d’un groupe terroriste en lien avec Al Qaïda qui ont crié des slogans hostile à l’Axe du Bien avant de se fondre dans une prétendue opinion publique, opinion qu’il convient de mettre sous haute surveillance.
Le 15 février fut une grande première : la globalisation des résistances à la privatisation du monde et à la guerre impériale. Avant même le début de la guerre, la mobilisation est supérieure à celle du Vietnam et l’obstination va-t-en-guerre des croisés de l’Occident devient donc un pari de plus en plus risqué.
Vus les enjeux pétroliers, géopolitiques (la prise de l’Irak permettra de contrer une éventuelle expansion chinoise) et économiques (l’augmentation des dépenses militaires permettant de relancer l’économie sans relancer la consommation et augmenter les salaires), cette guerre aura sans doute lieu. Toutefois les revendications en maximisent le coût politique, alors même que l’instauration d’un ordre impérial durable est un fardeau économique de plus en plus difficile à assumer pour les vassaux et que l’Europe commence à s’imaginer en puissance mondiale.
Il n’existe malheureusement pas encore de liens entre la montée des résistances sociales mondiales et les mouvements anti-guerre, mais les conflits sont des facteurs de politisation puissants. Entre les conceptions du monde développées à Davos et à Porto Allegre, il n’y a pas de troisième voie possible, ni d’apaisement envisageable.

« Les protestataires anti-guerre ignorent les horreurs »

Anti-war protesters ignore the horrors
Gulf News (Dubaï)

[AUTEUR] Amir Taheri est journaliste iranien et rédacteur en chef du journal français Politique Internationale. Il est expert du cabinet Benador Associates à New York.

[RESUME] J’étais avec des amis irakiens à la manifestation anti-guerre de Londres du 15 février afin de réclamer qu’une grand-mère irakienne ayant perdu ses trois enfants à cause de la répression de Saddam Hussein puisse prendre la parole et expliquer qu’il fallait libérer l’Irak. Toutefois, on ne nous a pas laisser nous exprimer et on a confisqué nos photos du gazage d’Halabja.
Ni le révérend Jesse Jackson, ni l’ancienne star aujourd’hui travailliste Glenda Jackson (qui veut servir de bouclier humain aux installations militaires du tyran irakien), ni Charles Kennedy, le président du parti Libéral démocrate britannique n’étaient prêts à nous écouter. Les manifestants, aveuglés par leur anti-américanisme, ne veulent pas voir les crimes de Saddam Hussein, mais mes amis Irakiens qui avaient beaucoup à dire sur les crimes de Saddam Hussein n’ont pas eu droit à la parole. Pour ces derniers, la répression, la torture et les massacres de Saddam Hussein sont déjà une guerre dont il faut libérer le peuple d’Irak. Les Européens défilent en soutien de l’incarnation du Mal et sont des Nazis soutenant le bourreau plutôt que la victime.
Ces manifestations sont un rassemblement de groupes de gauche. On y trouve des Staliniens, des Trotskistes, des Socialistes caviar, les pro-avortements, les anti-peine de mort, les gourous des droits des Noirs, les antisémites, le lobby pour la destruction d’Israël, les zélotes de la thèse « Bush n’a pas gagné en Floride », les partisans du désarmement unilatéral, les défenseurs de l’exception culturelle et les philosophes relativistes absolus. Toutefois, la majorité de la population de ces rassemblements est composée d’idéalistes et d’innocents citoyens servant d’« idiots utiles » à ces groupes. Quand l’Irak sera libéré, espérons que le monde se souviendra que cela n’aura pas été grâce aux manifestants.

« L’Azerbaïdjan est aux côtés de l’Amérique »

Azerbaijan stands by America
Washington Times (États-Unis)

[AUTEUR] S. Rob Sobhani est professeur à la Georgetown University et président de Caspian Energy Consulting. D’origine azérie et iranienne, sa famille a émigré en 1979 aux États-Unis. Il a été candidat républicain aux élections sénatoriales de 2000 dans le Maryland.

[RESUME] L’Azerbaïdjan, dont George W. Bush rencontre le président aujourd’hui, est un pays ami des États-Unis au sol riche en pétrole. Dès le lendemain du 11 septembre 2001, le président Aliev, fin connaisseur du danger islamiste en tant qu’ancien unique musulman du Politburo soviétique, avait offert le soutien immédiat et sans condition de son pays aux États-Unis. Ainsi, l’Azerbaïdjan a pris très vite des mesures concrètes pour aider les États-Unis et leurs alliés en Afghanistan, il a extradé de nombreux terroristes et fourni des renseignements précieux.
Depuis l’indépendance en 1991, Bakou est un allié utile de Washington compte tenu de sa proximité avec les réserves de la Mer Caspienne et, d’ici 2005, le pipeline le reliant à Ceyhan ne sera plus un rêve. Bien qu’à majorité chiite, l’Azerbaïdjan est un État laïc, pro-américain, pro-israélien et entretient de mauvaises relations avec l’Iran. Les tensions avec Téhéran sont à un point tel que, sous la menace de l’armée iranienne, les travaux exploratoires du projet Alov en Mer Caspienne entrepris par BP et ExxonMobil ont été interrompus. Ce projet permettrait de forer dix milliards de barils de pétrole.
Washington peut aider l’Azerbaïdjan en :
 Déployant des efforts diplomatiques pour mettre fin au conflit avec l’Arménie qui pourrait empêcher l’acheminement du pétrole et du gaz vers les marchés mondiaux.
 Négociant l’installation de bases états-uniennes dans le pays.
 Mettant la pression sur les ayatollahs iraniens pour qu’ils cessent leur comportement agressif vis-à-vis de leur voisin.
 Demandant à l’US Trade and Development Agency d’aider au développement de l’agriculture azérie.

« Se rapprocher des terroristes ? »

Outreach To Terrorists ?
New York Post (États-Unis)

[AUTEUR] [AUTEUR] Frank J. Gaffney Jr est président du Center for Security Policy, le think tank qui rassemble les principaux « faucons » états-uniens. La dernière enquête du Réseau Voltaire lui est consacrée : « Le Centre pour la politique de sécurité : les marionnettistes de Washington ».

[RESUME] L’arrestation de Sami Al-Arian pour cinquante chefs d’inculpation dont conspiration et financement d’une attaque terroriste ayant causée plus de cent morts n’est pas une arrestation politique comme il le prétend. Après tout, ce dirigeant avéré du Jihad Islamique palestinien, « l’un des mouvements terroristes les plus violents du monde » selon John Ashcroft, a été reçu à la Maison-Blanche par George W. Bush et Karl Rove, sans doute en raison de son action en faveur de Bush lors de la campagne présidentielle de 2000 pour convaincre les mosquées de Floride de voter pour le candidat républicain.
La question n’est pas de savoir s’il s’agit d’une arrestation politique, mais plutôt pourquoi un homme comme Al-Arian a été intégré à l’équipe du président par les conseillers de Bush ? Qui est responsable de ce choix ? Continuent-ils d’agir ainsi, quitte à miner les efforts de la guerre au terrorisme ?
Cela pourrait être la faute de Suhail Khan, ancien membre du Bureau des relations publiques, ou d’Ali Tulbah, aujourd’hui directeur d’un cabinet d’affaire, peut-être influencé par le fait que leurs pères étaient membres de groupes islamistes. Cela pourrait aussi être Grover Norquist, le coprésident de l’Islamic Institute, assurant le lien entre l’équipe Bush et des groupes excusant le terrorisme.
Qui que ce soit, ces personnes ont desservi le président Bush en le rapprochant de terroristes.