« Une théorie »

A Theory
National Review (États-Unis)

[AUTEUR] Michael Ledeen est éditorialiste régulier de National Review. Il est l’auteur de The War Against the Terror Masters. Il détient la chaire de la Liberté à l’American Enterprise Institute. À ce titre, il fut l’un des principaux organisateurs du dîner de gala du 26 février dernier au cours duquel George W. Bush prononça son discours sur l’avenir de l’Irak. Michael Leeden est l’un des expert du cabinet de relations publiques Benador Associates.

[RESUME] Imaginez un instant que les Français et les Allemands ne s’opposent pas à nous sur un coup de tête, mais que cette opposition fasse partie d’un plan à long terme.
Comme tout le monde, ces deux pays ont vu l’émergence des États-Unis comme seule superpuissance après la chute de l’URSS, ils ont vu que ce pays devenait une nation à laquelle personne ne pourrait résister. Certains idiots ont cru que la puissance reposerait désormais sur la puissance économique, mais les Européens cyniques ont compris que ce ne serait pas le cas. Ils ont compris que bientôt émergerait un Empire américain et ils ont imaginé un plan pour éviter cela. À leur place, vous auriez fait la même chose.
Ne pouvant pas affronter directement les États-Unis, la France et l’Allemagne ont passé un pacte avec les islamistes et les Arabes radicaux pour qu’ils attaquent les États-Unis en leur promettant en retour de bloquer toute contre-attaque états-unienne à l’ONU. Cette débauche de cynisme est dans les cordes de Paris et Berlin. Schröeder a gagné les élections en Allemagne en s’en prenant à l’Amérique et Chirac soutient la création d’un petit parlement musulman en France. Il a affirmé devant une foule algérienne enthousiaste qu’il empêcherait l’Amérique d’atteindre ses objectifs. Les deux dirigeants font beaucoup dans leur pays pour soutenir les institutions islamiques et laissent se propager le Wahabisme dans leur pays, même si cela est inconstitutionnel dans le cas de la France. La France et l’Allemagne font également le maximum pour arrêter ou détourner les embargos contre les pays arabes qui soutiennent le terrorisme islamiste.
Cela peut paraître fantaisiste, c’est sûr, mais cela expliquerait le comportement troublant de la France et de l’Allemagne. J’ai cru que la France se rallierait à nous à la dernière minute après avoir monnayé son soutien, mais en fait, elle est liée à l’Islamisme et nous combattra avant, pendant et après la guerre en Irak pour éviter l’édification d’un empire américain stable. Si j’ai raison, nous aurons à combattre le terrorisme au Proche-Orient, mais aussi au cœur de l’Europe de l’Ouest et, là encore, notre plus grande arme sera le désir de liberté des peuples des pays qui s’opposent à nous.

« Paris-Washington : des dégâts collatéraux déjà considérables »

Paris-Washington : des dégâts collatéraux déjà considérables
Le Figaro (France)

[AUTEUR] Olivier Dassault est député de l’Oise et secrétaire national de l’UMP. Il est le fils de Serge Dassault, PDG du groupe Dassault, actionnaire de référence de nombreux titres de presse, dont Le Figaro et Le Soir, et préside aussi le conseil de surveillance du groupe Valmonde (Valeurs actuelles, Le Spectacle du monde)

[RESUME] La crise irakienne n’est pas terminée, mais nous avons déjà pu mesurer la haine que nous portait la presse de caniveau britannique. Malheureusement, les plus puissants des médias américains ont les mêmes patrons anglais ou australiens que cette presse et ils ont transporté de l’autre côté de l’Atlantique leurs méthodes. Pourquoi se priveraient-ils d’attaquer la France ? Nous ne répondons pas à leurs attaques et cela permet de s’en prendre aux Américains opposés à la guerre sans non plus les insulter à dix-huit mois des élections.
Cette campagne anti-française risque d’être coûteuse pour notre économie et nous devons y répondre. Aux États-Unis, nous ne disposons pas de relais d’opinion tels qu’ont pu en construire les Anglais, les Italiens et les Allemands. Cette erreur est d’autant plus grave que les États-Unis disposent, eux, de l’Office of Global Communication. En attendant de disposer de tels réseaux, il est urgent de susciter une campagne de presse, par le biais d’associations amies, pour rectifier les clichés et éviter que l’image de la France et de ses entreprises soit durablement salies aux États-Unis.
Il faut faire passer les messages suivant :
 La France a été aidée par les Etats-Unis, mais sans la France, les États-Unis n’auraient pas gagné leur guerre d’indépendance. En aidant ainsi les États-Unis, la France s’est plongée dans une crise économique qui a conduit à la Révolution. Pourtant aujourd’hui, aucune plaque commémorative ou cimetière ne vient rappeler le sacrifice des 6 000 soldats français morts pour les États-Unis.
 Les Américains ne sont arrivés qu’à la fin des deux Guerres mondiales. Et dans le cas de la première, ils ont présenté la facture à la France, avant qu’elle ne soit répercutée sur l’Allemagne, ce qui a provoqué la seconde Guerre mondiale.
 Nous avons été aidé par le Plan Marshall, c’est vrai, mais la France a été le seul pays à le rembourser intégralement, avec les intérêts.
 On nous parle de Vichy, mais Roosevelt avait des relations ambiguës avec Vichy et détestait De Gaulle.
 Le boycott des produits français pourrait entraîner un contre-boycott en retour. Or, nous importons plus de biens américains que nous n’exportons vers les États-Unis.
 Il faut rappeler que les États-Unis ne respectent pas les règles de l’OMC.
Nous devons également faire deux observations :
 Les États-Unis bénéficient en France d’une grande sympathie dans la population, mais les Français n’accepterons pas longtemps d’être les seules victimes de la colère des États-Unis alors que nous avons la même position que l’Allemagne.
 Si la France devait être touchée plus durement que le reste du monde par les conséquences économiques de la guerre, à cause du ressentiment américain, cela prouverait que les États-Unis ne voulaient prendre l’Irak que pour son pétrole.

« La Paix n’est pas possible en face du Mal »

Peace Isn’t Possible in Evil’s Face
Los Angeles Times (États-Unis)

[AUTEUR] Elie Wiesel est Prix Nobel de la Paix 1986. Auteur, survivant du génocide, il a écrit plus de quarante livres. Il se flatte d’être un ami personnel, et de longue date, de la famille Bush.

[RESUME] En temps normal, je serai avec les manifestants pacifistes, mais pourtant je soutiens la politique de George W. Bush pour éradiquer le terrorisme international. La guerre contre l’Irak, un État voyou qui refuse de se désarmer pacifiquement, entre dans ce contexte.
Il n’y a pas d’autres options que cette guerre. Le passé récent montre que seule une intervention armée a mis fin au bain de sang dans les Balkans et au régime des Talibans. Nous devons nous souvenir que c’est l’absence d’intervention militaire qui a permis le génocide du Rwanda en 1994, comme le développement du pouvoir hitlérien dans les années 30. Le temps joue toujours en faveur des dictateurs.
Saddam Hussein a expulsé les inspecteurs en 1998 pour cacher ses armes biologiques et il attend le bon moment pour les utiliser. S’il fait des concessions mineures, c’est uniquement parce que les troupes américaines sont à ses frontières. Certains dirigeants européens n’ont pas cru Colin Powell quand il a présenté ses preuves. Moi, je le crois car il est un grand soldat qui n’aime pas la guerre et qui respecte l’ONU. Je ne crois pas qu’un homme de sa classe aurait sali son nom, son prestige, son honneur et sa carrière.
En face, nous avons un criminel, qui a gazé son peuple et qui devrait être inculpé pour crime de guerre. Il faut attaquer ce fou le plus tôt possible car nous avons un devoir moral à intervenir dans les endroits du monde contrôlé par le Mal, tel que l’Irak.

« Arrêtez, José Maria Aznar ! »

Arrêtez, José Maria Aznar !
Le Monde (France)

[AUTEUR] Baltasar Garzon est juge de l’Audience nationale, principale instance pénale d’Espagne. Il a instruit diverses affaires politico-financières et a acquis une renommé internationale en demandant l’extradition vers l’Espagne du général Pinochet.

[RESUME] José-Maria Aznar, vous devez choisir votre camp, celui de la légalité nationale et internationale ou celui du mensonge et de l’intérêt occulte de quelques-uns.
J’ai parfois l’impression que l’Espagne n’a plus d’homme politique, mais des murs de pierre sans sentiments. Je n’ai pas souvenir qu’une position politique ait un jour soulevé un telle contestation dans toutes les couches de la société espagnole, comme je n’ai pas souvenir d’un tel degré de cynisme, de démagogie et un tel « bombardement » de mensonges et de demi vérités chez certains dirigeants politiques.
Basta ya ! Ca suffit ! Depuis le 27 janvier dernier, j’ai observé les efforts que vous et Tony Blair faites pour justifier votre politique. George W. Bush ne se donne plus cette peine, et j’ai vu le suivisme des députés du Parti populaire. J’ai vu aussi la honte de certains d’entre eux, comme je connais celle des adhérents de votre parti. Je leur demande de marquer leur opposition. Les Espagnols savent que cette guerre est injuste et vous devez vous y opposer M. Aznar.
Si je peux comprendre, après avoir lu les déclarations de chacun, la position des États-Unis et, plus difficilement, celle du Royaume-Uni, je ne comprends pas pourquoi vous défendez cette guerre et pourquoi vous vous mettez en première ligne pour la défendre. Si c’est pour apparaître comme un grand homme d’État, vous devriez plutôt rejoindre la position de l’ensemble du monde civilisé qui a été exprimée, avec une fierté que vous ne pouvez pas comprendre, le 15 février. En défendant une nouvelle résolution vous cherchez juste un prétexte pour la guerre.
Vous parlez de liens entre Al Qaïda et l’Irak, mais ils n’ont jamais été prouvés. Vous rappelez, à raison, les violations des Droits de l’homme en Irak, mais vous ne parlez jamais de celle de Guantanamo, des centres de détentions américains en Afghanistan et des détenus mis au secret aux États-Unis. Vous prétendez que cette guerre va permettre d’en finir avec la menace des armes de destruction massive et du terrorisme que représente Saddam Hussein, mais c’est puéril. Vous faites comme si vous ignoriez que cette guerre injuste allait, à la fois, briser la légalité internationale et renforcer le terrorisme international, qui pourrait frapper l’Espagne.
José-Maria Aznar, n’emboîtez pas le pas de George W. Bush dans son mépris du droit international

« Pour une véritable paix en Irak »

Pour une véritable paix en Irak
Libération (France)

[AUTEUR] Kendal Nezan est président de l’Institut kurde de Paris.

[RESUME] Les Irakiens aspirent à vivre en paix, débarrassés de 35 ans de règne de Saddam Hussein, mais la France et ses alliés les privent de cet espoir en insistant sur le seul désarmement. Celui-ci pourrait permettre au dictateur de rester au pouvoir, inoffensif pour ses voisins, mais pas pour son peuple. De plus, si le désarmement a lieu pacifiquement, l’embargo sera logiquement levé et l’Irak retrouvera la manne pétrolière. Il s’en servira pour reprendre le Kurdistan et opprimer son peuple. C’est la situation logique à laquelle devrait aboutir la position française. Saddam Hussein, même sous embargo, a massacré 150 000 Chiite et chassé 250 à 300 000 Kurdes des territoires qu’il contrôlait.
La France se cache derrière le droit international pour affirmer qu’on n’a pas le droit de renverser Saddam Hussein. Elle se fichait pourtant de ce droit quand elle a renversé Bokassa. Elle s’en fichait tout autant quand elle a aidé Saddam Hussein à acquérir l’arme nucléaire dans les années 70, puis lorsqu’elle l’a soutenu pour attaquer l’Iran. De même, elle n’a condamné personne nominalement après le gazage de 5 000 Kurdes à Halabja. Sur ce point, elle n’est pas la seule car le Vatican et la Commission des Droits de l’homme de l’ONU, devant laquelle j’avais témoigné sur cette question en 1988, n’avait pas condamné non plus Bagdad. Il est étrange de voir que ceux-là même qui ont méprisé le droit international à l’époque, le défende aujourd’hui pour protéger Saddam Hussein qui leur doit de l’argent.
Les Irakiens sont déçus par la France, mais ne font pas pour autant aveuglément confiance aux États-Unis, car ils se souviennent d’avoir été abandonnés en 1991 après avoir été appelés à la révolte. Contre les excès de la répression, la France avait, à l’époque, inventé le droit d’ingérence humanitaire. Aujourd’hui, ce droit, qui a justifié l’intervention au Kosovo, doit être appliqué pour les Irakiens. Il faut intervenir, pas forcément de façon guerrière d’ailleurs, pour que Saddam Hussein quitte le pouvoir, par un exil volontaire par exemple. Une telle solution permettrait de reconstruire l’Irak sous l’égide de l’ONU.
Il y a de nombreuses raisons de s’opposer à l’unilatéralisme américain, mais cela ne doit pas conduire à défendre le statu quo.

« Une assistance extérieure qui fonctionne »

Une assistance extérieure qui fonctionne
Le Figaro (France)

[AUTEUR] Chris Patten est commissaire européen britannique chargé des Relations extérieures.

[RESUME] Alors que le monde est focalisé sur une éventuelle guerre en Irak, l’Union Européenne, dont les progrès en matière de politique étrangère et de sécurité commune sont limités, doit se souvenir de ses succès en matière de reconstruction et de stabilisation des pays sortant de conflits.
Ainsi, en Afghanistan, nous aidons un gouvernement novice à améliorer la vie de ses administrés. La Commission européenne a déjà versé 750 millions d’euros pour reconstruire les infrastructures du pays, développer la santé et l’éducation, permettre le retour des réfugiés, déminer une zone de 8 000 km2 et pour faire redémarrer l’économie locale. Nous savons qu’il s’agit d’un travail de longue haleine, mais nous pouvons déjà être fiers des actions menées et d’être le premier bailleur de fond du pays.
La Commission européenne est en train de réformer la mise en œuvre de son aide extérieure, qui est de 7 milliards d’euros par an, afin qu’elle soit plus efficace et plus rapide. Ainsi, au Kenya, nous sommes parvenus à faire passer nos délais moyens pour effectuer un paiement de cinquante à huit jours. Nous avons également réussi à réduire l’arriéré des projets anciens de 76 %. La qualité de notre aide s’accroît considérablement elle aussi et notre aide à la Serbie, après la chute de Milosevic a été exemplaire.
Par cette politique, l’Union européenne apporte une contribution réelle à la stabilité et à la sécurité du monde dans lequel nous vivons.

« L’Union européenne conserve un contact avec Pyongyang »

EU keeps channel open with Pyongyang
Japan Times (Japon)

[AUTEUR] Thanos Kafopoulos est le responsable du service de presse et d’information de l’ambassade de Grèce au Japon. La Grèce occupe actuellement la présidence tournante de l’Union européenne.

[RESUME] Le retrait de la Corée du Nord du traité de non-prolifération a causé une grande inquiétude dans le monde et a gelé les activités de la Korean Peninsula Energy Development Organisation (KEDO), dont l’Union européenne faisait partie. L’UE a soutenu la politique de rapprochement des deux Corée et entre Pyongyang et Tokyo. Elle regrette que tout cela ait été interrompu par la violation par la Corée du Nord de ses obligations internationales.
Lors de sa visite à Tokyo en février, le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères, Javier Solana a déclaré que, dès que les conditions seront favorables, nous enverrons une mission diplomatique auprès de Kim Jong Il. L’UE tient à ce que cette crise soit réglée par la négociation multilatérale, dans les instances internationales. Il faut que la Corée du Nord abandonne son programme nucléaire et, en échange, le pays recevra une aide technique et économique par la renaissance du KEDO. C’est déjà ce message que nous avons tenu au haut responsable nord-coréen qui est venu la semaine dernière à Bruxelles et à Athènes - qui préside actuellement l’Union européenne.
L’Europe a encore des liens diplomatiques avec la Corée du Nord et peut donc être utile à la résolution de la crise.

« L’eau devient de plus en plus un enjeu stratégique »

Water is increasingly becoming a strategic issue
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] Koichiro Matsuura est directeur général de l’UNESCO.

[RESUME] Partout dans le monde, les ressources en eau diminuent et le coût de sa qualité augmente. L’accès à l’eau potable est de plus en plus considéré comme un droit mais 1,2 milliard d’humains n’y ont pas accès et 2,4 milliards n’ont pas de système de purification. Il y a assez d’eau pour tous sur terre, mais il existe de grandes disparités sociales et géographiques.
L’approche du troisième Forum mondial de l’eau à Kyoto, le 16 mars, offre la possibilité de repenser notre approche de cette question en combinant attention, épargne et partage. Il faut que le droit à l’eau pour les citoyens devienne une obligation pour les autorités. L’agriculture, qui utilise des deux tiers de la consommation d’eau, doit être repensée afin d’éviter les gaspillage. Il faut lutter contre la pollution de l’eau due à l’industrie, l’agriculture et le développement urbain, car elle est dangereuse pour les écosystèmes et pour la santé.
L’UNESCO insiste depuis les années 70 sur cette question. Nous pensons que l’eau doit être reconnue comme un bien commun. C’est d’autant plus important aujourd’hui, car l’eau devient de plus en plus une question stratégique. Il est urgent de faire changer les mentalités, car les risques de guerre de l’eau augmentent.