« Suffisamment, c’est combien ? »

How much is enough ?
Washington Times (États-Unis)

[AUTEUR] Ralph Masi est un ancien officier de l’US Army. Il est analyste pour la Rand Corporation.

[RESUME] Les États-Unis courent des risques inacceptables en n’augmentant pas la taille de leurs forces militaires alors que nous avons 10 000 hommes basés en Afghanistan et 50 000 en Irak. Cette forte mobilisation hors de nos frontières exige que la Garde nationale et les juridictions locales se chargent de la sécurité intérieure. En effet, aujourd’hui, la défense du territoire est de plus en plus complexe et nécessite une préparation à la menace des armes de destruction massive et la surveillance des frontières et des côtes. On peut envisager de faire appel aux réservistes, mais cette solution ne tient pas sur le long terme.
Notre politique de recrutement doit tenir compte de la nouvelle doctrine des frappes préventives, des nouvelles responsabilités dans les missions de maintien de la paix et des missions de soutien et de préparation des populations dans le cadre des missions de sécurité de la patrie. Cela implique qu’il faut que l’extension du nombre de troupes soit compatible avec nos buts, que nos forces militaires soient structurées et équipées pour atteindre nos objectifs, tout comme nos réservistes doivent être capables de faire face à ces missions sur le long terme.
C’est en fonction de ces paramètres qu’il faudra définir le nombre de troupes manquant. Il faut donc entreprendre cette analyse maintenant.

« Faites-moi voler jusqu’à la Lune »

Fly Me to the Moon
New York Times (États-Unis)

[AUTEUR] William E. Howard III est un scientifique spécialisé sur les technologies spatiales ayant travaillé pour le gouvernement états-unien.

[RESUME] Le lancement de vols habités par la Chine qui aura lieu cette semaine passionne le pays le plus peuplé du monde, alors qu’aux États-Unis l’intérêt pour les programmes spatiaux est au plus bas. Il faut donc un nouvel objectif, à la fois réalisable et offrant la possibilité d’expérimenter des techniques utilisables pour envoyer des hommes plus loin dans l’espace, pour nous remobiliser. Il faut construire une base permanente sur la Lune.
Nous pourrions y tester la propulsion nucléaire, le contrôle des radiations, les techniques de communication avancées, expérimenter des habitats en milieu hostile, chercher de nouvelles technologies pour des explorations futures et développer les traitements médicaux appropriés à la vie en faible gravité. Et il ne s’agit là que de court terme car on ne connaît pas encore tous les développements qu’une telle base permettrait.
En outre, cette base pourrait être internationale, renforçant ainsi la coopération entre pays.

« Sans feuille de route, pas de règles, rien que la peur »

Without a Road Map, No Rules. Just Fear
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Robert Malley est directeur du Middle East Program de l’International Crisis Group. Il a été l’assistant spécial du président Bill Clinton sur la question israélo-arabe (1998-2001).

[RESUME] Après l’attentat suicide d’Haïfa, les menaces contre la vie d’Arafat et l’accélération du programme nucléaire iranien, le raid israélien en Syrie est simplement le dernier symptôme d’une tendance alarmante : l’oubli de toutes les règles définissant les comportement politiques des acteurs au Proche-Orient.
Aujourd’hui, les militants palestiniens frappent au-delà des frontières de 1967. Les soldats israéliens sont dans les territoires dépendant théoriquement de l’Autorité palestinienne. Ils condamnent les habitants à la misère ou pire, envisagent l’assassinat du premier président arabe élu démocratiquement et construisent un mur qui condamne la solution des deux États. Toutes les parties en présence ont perdu espoir en la paix et agissent en conséquence. Le dernier frein à leurs actions est la crainte des représailles, mais nous sommes proches d’une catastrophe liée à une mauvaise estimation d’un des acteurs.
Face à cette situation, les États-Unis sont absents et refusent de s’engager davantage dans le processus de paix. L’administration Bush a détruit l’ordre ancien au Proche-Orient, mais, à moins qu’elle ne parviennent à en construire un nouveau qui réponde aux attentes de tous les acteurs, nous allons vite le regretter.

« Cela nécessite plus que des armes »

It Takes More Than Guns
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Walter B. Slocombe est directeur pour la sécurité nationale et la défense dans l’Autorité provisoire de la coalition en Irak de [L. Paul Bremer III]. Il a été sous-secrétaire à la Défense pour les questions politiques dans l’administration Clinton (1994-2001).

[RESUME] Notre objectif en Irak est de rendre sa souveraineté à un État qui permettra une vie décente à son peuple et qui sera une force stabilisatrice dans la région. Nos efforts s’effectuent dans de nombreux domaines, mais ils contribuent tous à la sécurité de l’Irak, des États-Unis et du monde.
Bientôt, le Congrès votera la demande de fonds du président. Si cette somme est divisée entre plusieurs budgets, tous les fonds servent directement ou indirectement à soutenir nos troupes puisque la reconstruction permet le désengagement de nos soldats. En effet, ces fonds permettent la formation de la police et de l’armée irakienne, mais ils permettent aussi de combattre le terrorisme en améliorant la vie des Irakiens qui ont souffert de décennies vécues sous des régimes corrompus et de mauvaises gestions. Une amélioration des conditions d’existence de la population en même temps qu’un accroissement de libertés poussera la population à nous soutenir.

« À l’intérieur de la résistance »

Inside the resistance
The Guardian (Royaume-Uni)

[AUTEUR] Zaki Chehab est le rédacteur en chef du service politique de la télévision arabe al-Hayat-LBC. Il a été le premier journaliste à interroger des membres de la résistance irakienne.

[RESUME] Le kamikaze qui s’est fait exploser près de l’hôtel Bagdad était le quatrième membre de la résistance à mourir pour la cause. D’après ce que j’ai vu, il ne sera pas le dernier. L’utilisation des kamikazes ne signifie pas que les attaques sont conduites par des étrangers, mais que la résistance irakienne a changé de tactique. Les Irakiens se sont inspirés des expériences des autres.
Ma première rencontre avec des résistants s’est déroulée dans une ferme de Ramadi, un jour où l’on enterrait un jeune homme tué par des Américains car il ne s’était pas arrêté à un checkpoint. J’avais été frappé par la colère contre l’occupant qui régnait dans la population. Les hommes que j’ai rencontrés à cette occasion se définissaient comme nationalistes. Ils reprochaient à Saddam Hussein d’avoir provoqué l’arrivée d’étrangers sur leur sol. À Tikrit, j’ai rencontré d’autres résistants, se définissant cette fois ci comme des fidèles de Saddam Hussein. À Mossoul et Falluja, les résistants s’identifiaient aux Frères musulmans.
L’Irak a connu 20 ans de guerre et plus d’une décennie de sanctions. La résistance est disparate et ses ambitions sont antagonistes, mais son objectif immédiat est unique : lutter contre les forces d’occupation. Déjà, dans certaines régions des comités regroupent ses factions entre elles.
La résistance est renforcée par les erreurs de la coalition. Celle-ci devra changer de politique pour éviter que la situation devienne intenable pour elle.

« Pourquoi les Français défendent la souveraineté des Irakiens »

Why the French back sovereignty for Iraqis
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] Jean-Benoît Nadeau et Julie Barlow sont journalistes à Montréal et auteurs de Sixty Million Frenchmen Can’t Be Wrong.

[RESUME] La position de la France sur l’Irak est plus le fruit de son expérience que de sa rivalité avec les États-Unis. Dans les évènements qui ont conduit à la guerre, les Français se sont opposés aux moyens mis en œuvre par l’administration Bush et pas à la lutte contre les armes de destruction massive en elle-même. Aujourd’hui, ils s’opposent aussi à l’occupation de l’Irak.
Cela s’explique par le fait que la France a été un pays occupé de 1940 à 1944 et que le général de Gaule a refusé une occupation militaire des Alliés après la guerre. Il soupçonnait les Anglo-Saxons de vouloir en profiter et les Français de ne pas supporter une nouvelle occupation, même menée au nom de la reconstruction. C’est pour cette raison que De Gaule est arrivé en France huit jours après le débarquement à la tête d’un gouvernement provisoire et installa des responsables dans les régions libérées contre l’avis des alliés, en les plaçant devant le fait accompli.
La France est le seul pays d’Europe occidentale à s’être relevé de la guerre seul. Elle a voulu faire cette démonstration par fierté nationale. Dans l’expérience française, que Jacques Chirac veut appliquer à l’Irak, la souveraineté est un préalable à la reconstruction qui est un préalable à la Constitution et aux élections. Affirmer que les Français sont ingrats est un non sens quand on voit tous les monuments commémorant le sacrifice des soldats alliés. En revanche, les Français sont soupçonneux vis-à-vis de tout pays utilisant la gratitude pour ses propres intérêts et ils n’ont pas oublié les conditions accompagnant le plan Marshall.

« Traquer les maronites »

Stalking the Maronites
Jerusalem Post (Israël)

[AUTEUR] Américain d’origine libanaise, Walid Phares est professeur d’études moyen-orientales et analyste sur les questions de terrorisme pour MSNBC. Il est expert du cabinet Benador Associates et bénéficie d’une bourse de la Foundation for the Defense of Democracies, un think-tank créé par l’ex-patron de la CIA James Woolsey. Il préside la World Lebanese Organization qui milite pour la création d’un Liban exclusivement chrétien à côté d’un Israël exclusivement juif.

[RESUME] Quand Al-Jazeera a réalisé son reportage sur l’attentat suicide d’Haïfa du 4 octobre, le reporter a affirmé que le restaurant Maxim’s visé était la propriété d’un Arabe et que de nombreux Arabes avaient été tués. Ce n’est pas la première fois que des Arabes sont les victimes collatérales de ces attaques et cela force les pontifes d’Al-Jazeera à trouver des justifications pour ces meurtres.
Toutefois, le restaurant d’Haïfa visé n’était pas la propriété d’un « Arabe », mais d’un Libanais chrétien maronite. On peut d’ailleurs se demander si l’attaque a été conduite volontairement contre ce restaurant et si l’objectif était de tuer des juifs ou des chrétiens, à moins que ne ce soit les deux.
La communauté chrétienne libanaise est d’origine phénicienne. C’est le groupe ethnique le plus ancien du Liban. Elle a résisté aux assauts des conquérants arabo-islamiques pendant treize siècles, mais elle a été vaincue en 1990 après 15 ans de guerre contre l’OLP, la Syrie et les réseaux islamistes. Depuis la communauté chrétienne vit sous l’occupation syrienne et les intimidations du Hezbollah. Lors de la dernière décennie, un petit groupe de chrétiens, avec quelques musulmans et des druzes, s’allièrent à leur voisin juif dans le Sud dans la zone de sécurité. Mais Bill Clinton et Ehud Barak les ont abandonné en mai 2000. Six milles d’entre eux s’exilèrent vers Israël. La Syrie ba’asiste, l’Iran de Khomeyni et les jihadistes wahabites crièrent victoire : les infidèles étaient chassés du Liban et ils espèrent que demain ils seront chassés de Palestine.
La littérature anti-maronite abonde dans le Liban occupé et les chrétiens sont assimilés aux sionistes. Les jihadistes veulent s’attaquer aux chrétiens quand ils en auront terminé avec les juifs et l’attentat d’Haïfa marque leur impatience.

« Prêcher le terrorisme »

Preaching terror
Washington Times (États-Unis)

[AUTEUR] [Frank J. Gaffney Jr.] est président du Center for Security Policy, le think tank qui rassemble les principaux « faucons » états-uniens. Le Réseau Voltaire lui a consacré une enquête : « Le Centre pour la politique de sécurité : les marionnettistes de Washington ».

[RESUME] Jon Kyl va ouvrir aujourd’hui la session de la sous-commission judiciaire du sénat sur le terrorisme sur la question de l’infiltration des islamistes dans les aumôneries de l’armée et des prisons. Malheureusement, un des hommes responsables du recrutement et de la formation des aumôniers militaires musulmans ne pourra pas venir témoigner. En effet, Abdul Rahman al-Amoudi est en prison, attendant son procès pour liens illégaux avec un État soutenant le terrorisme : la Libye.
Son arrestation a eu lieu lors de la vague d’arrestations d’aumôniers accusés de trahison, certains ayant été formés par ses soins. Ces incidents mettent en lumière une question que se posent certains législateurs : les islamistes soutenus par l’Arabie saoudite ont-ils formé une cinquième colonne à l’intérieur de l’armée, des prisons, des mosquées et des universités ?
Al-Amoudi est l’un des fondateurs d’une des trois associations pouvant accorder une autorisation pour devenir aumônier dans l’armée. S’il coopérait, nous pourrions savoir comment l’Arabie saoudite et la Libye ont dépensé de fortes sommes pour dominer les associations musulmanes. M. al-Amoudi a déjà avoué s’être rendu en Libye pour récolter des fonds qui ont transité par des banques saoudiennes avant d’arriver aux États-Unis. En revanche, il nie être en lien avec des terroristes, bien qu’il ait publiquement soutenu le Hamas et le Hezbollah. Son procès pourrait être embarrassant pour certains musulmans qui prétendent être « avec nous » dans la guerre au terrorisme.

« L’Iran a besoin de la puissance nucléaire »

Iran needs nuclear power
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEURS] Mohammad Sahimi est professeur de chimie et d’ingénierie pétrolière à l’University of Southern California de Los Angeles. Pirouz Mojtahed-Zadeh est professeur de géographie politique et de géopolitique à l’université Tarbiat Modares de Téhéran et président de l’Urosevic Research Foundation de Londres. Kaveh L. Afrasiabi est professeur de politique moyen-orientale à la Chapman University.

[RESUME] Certains prétendent que le véritable objectif du programme nucléaire iranien est de développer des armes nucléaires et qu’avec sa réserve de gaz et de pétrole, il n’a pas besoin de cette énergie. Il faut pourtant noter que le programme nucléaire iranien a commencé avant la révolution islamique avec la bénédiction américaine et la participation de la France et de l’Allemagne. Les accords signés dans les années 70 se fondaient sur la certitude que l’Iran aurait besoin de l’énergie nucléaire pour son alimentation énergétique.
Avec une croissance annuelle de 6 à 8 % de la demande d’électricité et une population qui approchera les 100 millions en 2025, l’Iran ne peut pas se reposer exclusivement sur sa production de pétrole et de gaz. En outre, la production pétrolière iranienne souffre du manque d’investissement étranger à cause des sanctions américaines et n’a toujours pas retrouvé le niveau de production d’avant la révolution islamique. La production est de moins en moins exportée et, si les tendances restent les mêmes, l’Iran sera un importateur net de pétrole en 2010, une catastrophe pour un pays dont 45 % du budget dépend de cette ressource.
L’utilisation de l’énergie nucléaire n’est pas plus chère que l’exploitation pétrolière et gazière à des fins de production électrique. Elle permet de préserver les ressources de l ’Iran tout en évitant d’émettre trop de gaz carbonique. C’est en outre un bon moyen de diversifier les sources d’électricité pour Téhéran. Malheureusement les États-Unis et leurs alliés occidentaux craignent une bombe iranienne et n’ont pas reconnu la légitime quête d’énergie nucléaire de l’Iran, préalable à tout dialogue permettant d’empêcher Téhéran de construire sa bombe. La France, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont promis à l’Iran une coopération nucléaire en échange d’une transparence totale. Il s’agit d’une approche plus constructive que celle des États-Unis qui ignorent les inquiétudes énergétiques et sécuritaires de l’Iran.