Le général Myers a affirmé que l’assaut contre Falloudja était une « grande réussite » et les dirigeants irakiens ont déclaré que la ville était « libérée ». Toutefois, il sera difficile d’estimer réellement le succès dans cette bataille : il n’y a pas d’armée en uniforme, pas de quartier général, pas de complexe de commandement central à occuper et au finale il n’y aura pas d’abdication. La seule façon de mesurer la victoire, c’est d’évaluer son impact sur le processus politique et diplomatique en Irak. Or, dans ce domaine, nos chances de succès sont très incertaines.
Depuis de nombreux mois, une attaque sur Falloudja est inévitable. Si nous voulons réussir la démocratisation de l’Irak, nous devons avoir avec le gouvernement intérimaire le « monopole » de l’usage de la force. Il ne doit pas y avoir de sanctuaires pour les insurgés et les terroristes. Il ne fait aucun doute que nous gagnerons sur le champ de bataille, mais cela ne veut pas dire que nous allons vraiment « gagner ». Pour cela, il faudrait que cette bataille serve à détruire l’opposition locale de façon permanente, démoralise la résistance et confère une légitimité aux États-Unis. Il faut donc que cette bataille soit une partie d’une stratégie globale.
Il n’est jamais facile de combattre une guérilla urbaine car le terrain annule notre supériorité militaire dans certains domaines. Il faut par ailleurs que notre diplomatie décourage la Syrie d’aider les insurgés, l’Iran de mobiliser les chiites et les Saoudiens de pousser les sunnites à conserver leur domination. Cela nécessite que nous nous concentrions sur l’Irak et que nous remettions à plus tard la réforme de ces pays. Il faut également chercher une solution au conflit israélo-palestinien qui fournit des recrues aux jihadistes. Plus important encore, nous devons renforcer le gouvernement irakien.
Si ces actions échouent, la victoire militaire à Falloudja est inutile.

Source
Gulf News (Émirats arabes unis)
Gulf News est le principal quotidien consacré à l’ensemble du Golfe arabo-persique, diffusé à plus de 90 000 exemplaires. Rédigé à Dubaï en langue anglaise, il est principalement lu par la trés importante communauté étrangère vivant dans la région.
Washington Post (États-Unis)
Quotidien états-unien de référence, racheté en août 2013 par Jeff Bezos, fondateur d’Amazon.

« The Real Battle », par Wesley K. Clark, Washington Post, 14 novembre 2004.
« Winning in Fallujah is just the beginning », Gulf News, 17 novembre 2004.