« Le statu quo peut être un danger pour les alliés »
Status quo can be a danger to the allies
Gulf news (Dubaï)
[AUTEUR] Amir Taheri est journaliste iranien et rédacteur en chef du journal français Politique Internationale. Il est expert du cabinet Benador Associates à New York.
[RESUME] Les médias et les stratèges de comptoir du monde arabe pensent que la guerre se déroule mal et certains disent même que Saddam Hussein peut la gagner.
En réalité, en moins de dix jours, dont deux d’inaction en raison des tempêtes de sable, les forces de la Coalition ont pris le contrôle des voies de communication, de l’espace aérien et du seul accès à la mer de l’Irak, le port d’Umm Qasr. Les dirigeants irakiens sont obligés de se terrer dans leurs bunkers. Tous les aéroports, à l’exception de quatre d’entre eux, et les deux tiers du système ferroviaire sont aux mains des troupes anglo-américaines. Elles pourraient, si elles le voulaient, priver Bagdad d’eau et d’électricité
Dans quelques jours, Bagdad sera encerclé et Saddam Hussein ne contrôlera plus que 5 % du territoire irakien. Il ne contrôle déjà plus qu’une de ses frontière, celle avec la Syrie. La coalition s’est déployée et contrôle 80 % des réserves de pétrole. Aujourd’hui, le régime de Saddam Hussein ne contrôle plus que 40 % de la population, tandis que 20 % est sous contrôle de la Coalition et de ses alliés kurdes. Le reste de la population vit dans des zones qui sont sous contrôle de la Coalition, mais dans une situation plus incertaine.
Militairement, la victoire est incontestable, mais la première phase de la guerre de la propagande a été perdue. Il existe aussi deux autres problèmes : la Coalition n’a pas assez de soldats pour surveiller les lignes d’approvisionnement et la présentation de la stratégie apparaît comme confuse. Il ne faut pas en tout cas qu’un nouveau statu quo s’installe en Irak et que Saddam ait à faire face à une guerre de faible intensité.
« Pourquoi n’y a-t-il pas assez de troupes en Irak ? »
Why Aren’t There Enough Troops in Iraq ?
New York Times (États-Unis)
[AUTEUR] Joseph P. Hoar est ancien général des Marines. Il a été Commandant en chef du Commandement central des États-Unis (1991-1994).
[RESUME] Aujourd’hui, on parle moins de « Shock and Awe », de déplacement éclairs et de rapidité dans la prise de décision. Nos dirigeants nous préparent à une longue lutte qui nécessite plus de troupes au sol pour faire face à une résistance irakienne déterminée. Des renforts sont en route, mais ces nouvelles troupes seront-elles suffisantes et pourquoi n’ont-elles pas été envoyées au début ?
En 1991, la coalition comptait 11 divisions, sans compter les troupes arabes, pour prendre une zone de la taille du New Jersey. Aujourd’hui, il y en a six pour conquérir un pays de la taille de la Californie. L’amélioration technologique des 12 dernières années ne peut pas tout. En 1991, tout le monde savait qui avait conçu le plan d’attaque et comment il avait été pensé. Aujourd’hui, personne, hormis un petit cercle d’initiés, ne sait exactement qui a développé le plan et quelles vues ont prévalu. L’été dernier, les dirigeants civils du département de la Défense états-unien se sont opposés à ce que les officiers du Commandement central ou de l’état-major interarmées exposent au Sénat leur point de vue sur les moyens à mobiliser.
Qui a imposé ses idées dans le plan au Pentagone, au National Security Council ou au sein de l’état-major interarmées ? On m’a dit que dans les derniers mois, les rapports entre les militaires et les civils du Pentagone avaient été tendus et que les militaires qui avaient demandé trois divisions de plus avaient été ridiculisés par les civils. Un ancien général quatre étoiles m’a dit que le débat portait moins sur l’Irak que sur les transformations de la défense, chères aux civils.
Il existe une croyance à la Maison Blanche, une croyance selon laquelle la guerre peut être gagnée sans troupes au sol grâce à la technologie. Nous allons certes gagner cette guerre, mais le coût de la stratégie employée se comptera en vies américaines. J’espère qu’après la guerre, les responsables militaires et civils seront entendus par le Sénat et qu’ainsi la population américaine saura pourquoi on n’a pas envoyé suffisamment de troupes dès le début.
« Les tortures commises par Saddam ne se font pas devant les caméras »
Saddam’s torture is not on camera
The Independant (Royaume-Uni)
[AUTEUR] Jack Straw est ministre travailliste des Affaires étrangères britanniques. Cette tribune reprend des extraits d’un discours prononcé à l’occasion du dîner annuel de la Newspaper Society à Londres dont on trouvera le texte intégral sur le serveur du Whitehall.
[RESUME] La presse a un rôle crucial en temps de paix, mais plus encore en temps de guerre. Ainsi, pendant la guerre du Vietnam, les images ont développé l’opposition au conflit et, durant celle des Malouines, les images ont permis la mobilisation de la nation à un moment clé. Au Kosovo, Milosevic avait sous-estimé le pouvoir de la télévision et ce sont les images du massacre dans un village de Racak qui ont poussé l’opinion à soutenir la guerre.
Il y a un paradoxe dans la couverture médiatique de l’Irak. Saddam Hussein a commis des atrocités pendant 20 ans, mais comme il n’y avait pas de caméras, cela n’a pas réveillé la conscience mondiale et il a pu continuer à mener sa guerre cachée contre son peuple. Il n’y a pas de caméras dans les salles de torture de Saddam, mais les souffrances sont réelles. Tant que le régime irakien n’a pas été renversé, il est un affront aux idéaux qui sous-tendent les politiques étrangères du Royaume-Uni, des États-Unis et de nos alliés européens.
« La bataille pour nos cœurs et nos esprits »
The battle for our hearts and minds
The Guardian (Royaume-Uni)
[AUTEUR] Phillip Knightley est membre du Brisbane Institute. Il est l’auteur de The First Casualty.
[RESUME] L’Irak est en train de gagner la guerre de la propagande contre la coalition. Alastair Campbell et le Psychological Operations Tactical Group for Special Ground Forces Command (Psyops) travaillent à un plan d’urgence.
Tout s’est mal passé pour la Coalition sur le front de la propagande : la couverture médiatique des soldats britanniques tués par les soldats états-uniens, les femmes et enfants irakiens abattus par des États-uniens, les conséquences des bombardements montrées par Al-Jazira, les affirmations contradictoires des militaires et l’absence d’Irakiens célébrant les libérateurs. George W. Bush, Donald Rumsfeld, Tony Blair et Jack Straw avaient affirmé que l’armée irakienne se rendrait en masse et que la population se soulèverait, mais rien de tel n’a eu lieu.
Face au changement de ton des médias, de moins en moins optimistes, Campbell a demandé à Geoff Hoon de parler de la nécessité de voir une vision d’ensemble du conflit pour bien l’analyser. Le département de la Défense états-unien a poussé les médias américains et britanniques à retirer leurs envoyés spéciaux de Bagdad. D’après un rapport du Psyops, intercepté et diffusé par les Russes, les Irakiens sont aujourd’hui plus confiants que dans les jours qui ont précédé le début de la guerre et il faut vite agir avant que ne se développe une « idéologie de la résistance » en Irak. Le rapport propose que les prisonniers de guerre irakiens soient rassemblés pour donner des images de groupe plus impressionnantes, que des leaders d’opposition irakiens aient plus la parole et qu’on montre des Irakiens « libérés » s’en prenant à Saddam Hussein. Mais les médias se méfient de plus en plus des histoires servies sur un plateau et lorsqu’ils les répercutent, les médias neutres ou arabes taillent ces informations en pièce.
Le rapport montre surtout que la principale erreur a été de ne pas comprendre le point de vue des Irakiens : un peuple dont l’Occident prétend faire le Bien contre son gré depuis la fin de la première Guerre mondiale. En fait, si Tony Blair veut gagner la bataille des cœurs et des esprits en Irak il doit leur dire la vérité : « Pour libérer certains d’entre vous, nous allons devoir tuer beaucoup d’entre vous ».
« Les liens de la foi et de la liberté »
Ties of faith and freedom
Washington Times (États-Unis)
[AUTEUR] Tom DeLay est chef de la majorité républicaine à la Chambre des représentants.
[RESUME] Aujourd’hui, à Washington, plusieurs centaines de pasteurs et d’activistes chrétiens se rassembleront (sans marcher dans les rues, bloquer le trafic et affronter les forces de l’ordre aux frais des contribuables) pour soutenir Israël en venant écouter les dirigeants qui comprennent leur attachement à Israël.
Ils partagent la conviction qu’Israël est notre allié et frère en démocratie, liberté religieuse et respect des Droits de l’homme. Beaucoup de ceux qui veulent opposer les religions entre elles pour nous séparer du peuple irakien, comme Saddam Hussein, mettent en doute la sincérité des chrétiens envers Israël car ils ne comprennent pas notre attachement à la liberté religieuse. L’attachement des chrétiens n’est pas nouveau. Il prouve que cette cause ne concerne pas que les juifs, mais toutes les nations qui aiment la liberté.
Au moment où nous allons libérer le peuple irakien nous devons soutenir les nations qui partagent nos valeurs et notre attachement à la démocratie. Aujourd’hui, les dirigeants chrétiens vont montrer au monde qu’ils soutiennent Israël et la démocratie. Je suis fier d’être l’un d’entre eux.
« Aller au-delà du contretemps commercial »
Moving beyond a trade setback
International Herald Tribune (États-Unis)
[AUTEUR] Supachai Panitchpakdi est directeur général de l’OMC.
[RESUME] Quand les négociations de l’OMC ont commencé, en novembre 2001, les États membres s’étaient donné jusqu’au 31 mars 2003 pour résoudre la question des entraves commerciales et des subventions dans l’agriculture. Nous n’y sommes pas parvenus. Les pays riches subventionnent leur agriculture et la protègent des importations, empêchant ainsi le développement des pays pauvres en les privant de 60 milliards de dollars de recettes par an d’après la Banque mondiale.
Nous devons préparer ensemble la réunion interministérielle de Cancun, au Mexique. Nous ne devons pas nous décourager. Rappelons-nous que le cycle de négociation de Doha a quand même avancé plus vite que l’Uruguay Round. En outre, les désaccords sur l’agriculture ne doivent pas nous bloquer sur les autres questions abordées : la libéralisation des services, la réduction des taxes sur les produits manufacturés, la lutte contre les pratiques portant atteintes à la concurrence et les relations entre le commerce et la protection de l’environnement. Or des progrès ont été accomplis dans ces domaines, mais ils sont bloqués par la question agricole.
La réunion de Cancun en est rendue plus difficile et, si nous pouvons repousser des décisions, il ne faut pas que nous rations la nouvelle échéance de 2005.
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