Conférence Axis for Peace 2005
Intervention de Salim Lamrani à la table ronde « l’ingérence par la menace terroriste ». De droite à gauche : Salim Lamrani, Zeina Fayad, Philip Berg et Webster Tarpley.

Dans l’histoire du terrorisme international, le cas de Cuba revêt un caractère exceptionnel et unique. Depuis 1959 jusqu’à aujourd’hui, Cuba a été victime d’une intense campagne de terrorisme, de sabotage, d’une invasion armée, d’une menace de guerre nucléaire, de sanctions économiques extrêmement sévères et d’une implacable agression politique, médiatique et diplomatique [1].

Terrorisme international et sabotage économique

Les documents officiels des États-Unis désormais déclassifiés montrent qu’entre octobre 1960 et avril 1961, la CIA a introduit à Cuba 75 tonnes d’explosifs lors de 30 missions aériennes clandestines, et 45 tonnes d’armes et d’explosifs lors de 31 infiltrations maritimes. La CIA a réalisé durant cette courte période de 7 mois 110 attentats à la dynamite, a placé 200 bombes, a fait dérailler 6 trains, a brûlé 150 usines et a déclenché 800 incendies dans des plantations.

Entre 1959 et 1997, les États-Unis ont réalisé 5780 actions terroristes contre Cuba. 804 sont des actes terroristes d’envergure, dont 78 bombardements contre la population provoquant des milliers de victimes.

Les attentats terroristes contre Cuba ont coûté la vie à 3478 Cubains et ont paralysé à vie 2099 personnes. Entre 1959 et 2003, il y a eu 61 séquestrations d’avions et de bateaux. Entre 1961 et 1996, 58 attaques à partir d’embarcations maritimes ont touché 67 objectifs économiques et la population.

La CIA a dirigé et soutenu 299 groupes paramilitaires constitués de 4000 individus. Ils sont responsables de 549 assassinats et ont fait des milliers de blessés.

En 1971, l’agression biologique a causé la destruction d’un demi million de porcs. En 1981, l’introduction de la dengue hémorragique a fait 344 203 victimes, 158 décès dont 101 enfants. Le 6 juillet 1982, 11 400 personnes ont été touchées en un seul jour.

La grande majorité de ces agressions étaient préparées en Floride par l’extrême droite d’origine cubaine organisée et financée par la CIA.

Impunité pour les terroristes

Luis Posada Carriles [2], que le FBI considère comme « le pire terroriste de l’hémisphère », jouit d’une grande impunité. Il est actuellement protégé par l’administration Bush alors qu’il est responsable de nombreux attentats. Le Venezuela exige toujours son extradition. Il est notamment l’auteur du sanglant attentat de Barbade contre un avion civil en octobre 1976 qui a coûté la vie à 73 personnes. Orlando Bosh, autre terroriste notoire est responsable de dizaines d’assassinats. Le 23 juin 1989, le Département de la Justice a déclaré dans un rapport que la présence de Bosh aux États-Unis était inadmissible. Quelque temps plus tard, après que la justice ait lourdement condamné Bosh pour terrorisme, il a été gracié par le président Bush père. Actuellement, il se promène tranquillement à Miami et apparaît dans divers médias dans lesquels il déclare qu’il prépare toujours des attentats contre Cuba.

Le cas des Cinq

Le 16 et le 17 juin 1998, le gouvernement cubain a invité deux importants responsables du FBI, pour leur remettre de nombreux documents prouvant la dangerosité de 40 personnes lourdement impliquées dans le terrorisme et vivant en Floride. À ce jour, aucune d’entre elles n’a été inquiétée par les autorités états-uniennes malgré les preuves dont elles disposent.

Trois mois plus tard, le 12 septembre 1998, le FBI a procédé à l’arrestation de cinq Cubains : René González Sehweret, Ramón Labañino Salazar, Fernando González Llort, Antonio Guerrero Rodríguez et Gerardo Hernández Nordelo, qui, au risque de leur vie ont recueilli des informations sur les plans criminels des groupuscules terroristes de Miami, et qui avaient réussi à empêcher la réalisation de près de 170 attentats contre Cuba en avertissant à temps le gouvernement de La Havane.

Un procès inique

Les Cinq ont été accusés d’espionnage. Cependant l’accusation formelle ne leur a été notifiée que 4 jours après leur arrestation, et après avoir déclenché une immense campagne de presse qui les avait condamnés avant même le début de la procédure judiciaire.

Le 14 septembre 1998, le Grand Jury de Floride les a accusé d’avoir infiltré les groupes terroristes. Puis voyant que le chef d’inculpation était juridiquement insoutenable, le Jury a changé de méthode et a accusé les Cinq de 26 chefs d’inculpation, dont le plus grave est le premier (18 usc 371) qui fait référence à une conspiration pour commettre des délits contre les États-Unis. Le second chef d’inculpation évoque l’espionnage. La 3ème charge accuse Gerardo Hernández d’homicide volontaire, en référence aux évènements du 24 février 1996 où 4 membres de l’organisation terroriste Hermanos al Rescate ont été abattus après avoir violé maintes fois l’espace aérien cubain. Aucune preuve n’a pu être apportée par le procureur pour ces trois chefs d’inculpations. Les 23 autres accusations sont mineures et font références à l’usage de fausse identité, au fait de ne pas s’être enregistré comme agent d’une puissance étrangère. Elles n’ont pas été rejetées par la défense.

Depuis la date de leur arrestation jusqu’au 3 février 2000, c’est-à-dire durant 17 longs mois, ils ont été maintenus en cellule d’isolement, éloignés des autres détenus. Ils ont été confinés au cachot durant toute cette période sans communication extérieure.

Étant donné qu’il était impossible pour le tribunal de prouver les actes d’espionnage, il a accusé les Cinq de conspiration en vue de commettre des actes d’espionnage.

Un tribunal partial

Durant le procès, le procureur a évoqué la loi de procédure pour l’information classée qui permet de garder les preuves secrètes et de ne pas les présenter à la défense, tout en les utilisant contre les accusés. En voyant que son accusation ne tenait pas la route, le procureur a répété trois fois en plein procès, avec une véhémence démesurée, que les Cinq étaient venus à Miami « pour détruire les États-Unis ».

Les arguments qui démontrent que les Cinq n’avaient pas réalisé des activités relevant de l’espionnage n’ont pas été présentée par la défense, mais par des militaires états-uniens de haut rang : le contre-amiral de la Marine de guerre des États-Unis, M. Eugene Carroll ; le général de division de l’Armée des États-Unis, M. Edwards Breed Atkeson, et le lieutenant-général des forces aériennes des États-Unis, M. James R. Clapper.

Pour justifier l’acte de conspiration de réaliser des activités d’espionnage, le procureur a utilisé le fait que Antonio Guerrero travaillait dans un atelier de métallurgie de la base d’entraînement de l’armée à Boca Chica. La défense a interrogé les hauts responsables militaires :

 Question posée par la défense au contre-amiral Eugene Carroll sur Boca Chica : « Quelles informations sur la tactique et les entraînements de la marine de guerre des États-Unis pourrait être utile à l’armée cubaine ?  »
 Réponse : « Aucune que je sache ».

 Questions posées au général Atkeson : « Existent-ils des différences entre notre relation avec le pacte de Varsovie et l’Union soviétique en Europe et notre relation avec Cuba ? »
 Réponse de Atkeson : « Oui, des différences existent ».

 Question : « Quelles sont ces différences ?  »
 Réponse : « Les Cubains ne constituent pas une menace pour nous ». (Rappelons l’hystérie du procureur « ils sont venus détruire les États-Unis »)

 Question : « Quelle est le rapport entre la crainte d’être attaqué et la recherche d’information ? »
 Réponse : « Je pense qu’ils utilisent leurs services de renseignement pour découvrir si nous nous préparons réellement à les attaquer ».

 Question : « Dans l’examen que vous avez effectué des documents, avez-vous rencontré des documents classés secret ? ».
 Réponse : « Non ».

 Question : « Avez-vous trouvé des instructions pour que les agents cherchent des documents qui peuvent nuire aux États-Unis ? ».
 Réponse : « Non ».

 Questions posées au lieutenant-général Clapper : « Etes-vous d’accord pour dire que l’accès à une information publique ne constitue pas un acte d’espionnage ? ».
 Réponse : « Oui ».

 Question : « Vous, avec votre expérience en renseignement, vous ne classeriez pas Cuba comme une menace militaire pour les Etats-Unis ?
 Réponse : « Pas le moins du monde. Cuba ne représente pas une menace ».

 Question : « Avez-vous trouvé une preuve indiquant que Gerardo Hernández cherchait à obtenir des informations secrètes ? ».
 Réponse : « Pas que je me souvienne ».

Des preuves inexistantes

Pour ce qui concerne Gerardo Hernández, accusé d’assassinat, le procureur a reconnu que « au vu des preuves présentées lors du procès, prouver l’implication de Gerardo Hernández représente un obstacle impossible pour les Etats-Unis ». Cependant, le jury a reconnu Gerardo Hernández coupable d’assassinat malgré les aveux du procureur, incapable de prouver la charge. Il n’y a pas d’équivalent dans l’histoire de la justice des États-Unis. Les Cinq ont été condamnés à de lourdes peines malgré le fait qu’aucun des actes d’accusation n’ait pu être prouvé. Il s’agit en réalité d’un procès politique.

Des peines extrêmement lourdes

Gerardo Hernández Nordelo a reçu une sentence cumulant deux peines de prison à perpétuité plus 15 ans. Ramón Labañino Salazar a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité assortie de 18 ans. Antonio Guerrero Rodríguez a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité plus 10 ans. Ces trois personnes doivent terminer leur vie en prison et renaître une nouvelle fois pour purger leurs peines, sauf Gerardo Hernández qui nécessite trois vies pour être en règle avec la justice états-unienne. Quant à Fernando González Llort, il a été condamné à 19 ans de prison et René González Sehweret à 15 ans de détention. Au total, les Cinq ont été sentencié à quatre peines de prison à perpétuité, doublées de 77 ans de privation de liberté.

De nombreuses violations juridiques lors du procès

Les violations juridiques commises à l’encontre des Cinq sont extrêmement nombreuses :
 Suite à leur arrestation, ils n’ont pas eu immédiatement droit à un avocat.
 Ils ont dû attendre plus de deux jours pour disposer d’une représentation juridique.
 Ils ont été interrogés durant de longues heures sans la présence de leur avocat.
 Ils ont été maintenus 17 mois en isolement, en violation des règles pénitentiaires qui prévoient l’isolement uniquement pour les individus assassins et pour une durée maximale de 60 jours.
 20 000 pages de preuves présentées contre eux ont été classifiées.
 Ils n’ont pas pu être en contact avec leurs avocats pour préparer leur défense.
 Des témoins à charge ont été menacés de complicité s’ils révélaient des informations à la défense.
 Le procès n’a pas été délocalisé dans une autre ville que Miami, malgré l’atmosphère extrêmement politisée qui s’abat sur tout ce qui est en rapport de près ou de loin à Cuba.
 Avant le début du procès, une violente campagne de propagande dans les médias accusait les Cinq d’espionnage. Selon une enquête réalisée à l’époque, 79% des personnes consultées avaient admis être prédisposées contre les inculpés.
 Les jurés ont été menacés de mort s’ils s’avisaient à acquitter les accusés comme le montrent plusieurs articles de la presse locale [3].
 Le jury a fait preuve d’une partialité manifeste. Il était composé de 12 membres. Le président du jury avait déclaré être contre « la dictature de Fidel Castro ». Les 11 autres membres avaient des opinions similaires.

Des groupuscules terroristes protégés

Le procès, en plus de constituer une action politique contre Cuba, cherchait à protéger les organisations terroristes, comme le montrent les déclarations surréalistes de la juge Joan A. Lenard. Le procureur a proposé à René González, qui a pris 15 ans pour avoir infiltré les groupes terroristes, d’effectuer un faux témoignage contre ses compatriotes en échange d’une libération. Il lui a naturellement opposé un refus cinglant. La juge a exprimé sa « préoccupation parce que cet accusé après avoir accompli sa peine reprendra ses activités ». La juge a donc ajouté à sa peine de 15 ans la « condition spéciale additionnelle de lui interdire de s’associer avec des individus ou des groupes terroristes, des membres d’organisations qui prônent la violence, des figures du crime organisé ou de visiter des endroits spécifiques fréquentés par ces derniers ». Le tribunal reconnaît explicitement que Miami abrite « des individus ou des groupes terroristes » et ne fait rien alors que le président Bush a déclaré la « guerre contre le terrorisme ».

Condamnations annulées et détentions arbitraires

En avril et mai 2003, la procédure d’appel a été lancée par la défense auprès de la Cour d’Atlanta. Le 27 mai 2005, le Groupe de travail sur les Détentions arbitraires des Nations unies a déclaré que la détention des Cinq était arbitraire et violait le Droit international. Le 9 août 2005, la Cour d’Appel du Onzième Circuit d’Atlanta a annulé le jugement de première instance et depuis cette date, les Cinq sont non seulement injustement incarcérés mais également illégalement incarcérés.

Des cas de torture psychologique et morale

Plusieurs cas de torture psychologique et morale ont eu lieu à l’encontre des familles des Cinq. Mme Olga Salanueva, épouse de René González et sa fille Ivette, n’ont toujours pas eu le droit de rendre visite à leur parent. Mme Adriana Pérez O’Conor, épouse de Gerardo Hernández, n’a toujours pas pu rendre visite à son mari. Cela fait près de 8 ans qu’elles n’ont pas vu leur conjoint. Le traitement réservé à Adriana constitue réellement un cas de torture psychologique. Le 25 juin 2002, elle a obtenu un visa pour rendre visite à son mari détenu à Los Angeles, après 5 ans d’attente. Mais à son arrivée aux États-Unis, elle a été arrêtée par le FBI, interrogée pendant 11 heures et expulsée vers Cuba.

Pour justifier de telles iniquités, le gouvernement des États-Unis a déclaré que Mme Olga Salanueva et Mme Adriana Pérez ne peuvent point obtenir de visa car elles représentent une menace pour sa sécurité nationale. Même la petite Ivette âgée de 8 ans, qui ne connaît toujours pas son père, représente une dangereuse menace pour la sécurité intérieure des États-Unis selon le Département d’État.

Pour entraver les visites consulaires aux Cinq, ces derniers ont été placés dans des pénitenciers aux quatre coins du pays : Gerardo Hernández en Californie, Antonio Guerrero au Colorado, Fernando González dans le Wisconsin, Ramon Labañino au Texas et René González en Caroline du Sud.

La législation états-unienne et le droit international bafoués

Le procès des Cinq viole la Constitution des États-Unis, les Régulations du bureau des prisons fédéral, la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants, la Convention de Vienne sur les droits civils et politiques, la Convention sur les droits de l’enfants, les Règles minimales de l’Onu pour le traitement des prisonniers et la Convention américaine des droits de l’homme.

Le double standard des médias internationaux

Washington abrite sur son territoire des groupuscules terroristes qui mènent une guerre sans merci contre la Révolution cubaine. Ces entités fascistes agissent à ciel ouvert et en toute impunité, car elles ont historiquement bénéficié du soutien de la Maison-Blanche. L’épisode de M. Luis Posada Carriles, qui se trouve aux États-Unis depuis mi-mars 2005, alors que les tribunaux états-uniens lui ont notifié une interdiction du territoire pour activités terroristes, a jeté une nouvelle lumière sur l’imposture que constitue la « guerre contre la terreur ».

Cependant, le double standard que les États-Unis appliquent dans leur « lutte contre le terrorisme », qui n’est en réalité qu’un subterfuge camouflant des aspirations hégémoniques, s’étend également aux médias internationaux qui avalisent, assimilent et appliquent la doctrine du «  bon et du mauvais terroriste ». Ils se font ainsi complices d’une manœuvre globale et entérinent de facto les plans impérialistes états-uniens.

Ce complot médiatique est d’une évidence aveuglante. Comment est-il possible qu’à l’heure de la « guerre contre le terrorisme », les transnationales de l’information et de la communication n’abordent pas le cas de Cuba, le pays qui a souffert et qui continue de souffrir de la plus longue et féroce campagne terroriste de l’histoire moderne ?

Au nom de quelle amnésie idéologique la presse internationale n’a-t-elle pas évoqué, après les attaques du 11 septembre 2001, le sanglant attentat commis le 6 octobre 1976 contre un avion commercial de Cubana de Aviación à Barbade alors qu’il s’agit d’un des premiers actes de terrorisme aérien de l’histoire. Comment peut-on concevoir qu’au moment où les États-Unis hébergent et protègent M. Luis Posada Carriles, les médias internationaux préfèrent s’épancher sur la réunion d’un petit groupe de « dissidents » cubains financés et contrôlés par Washington, comme le démontrent les propres documents du Département d’État nord-américain ?

Le traitement médiatique réservé à la problématique du terrorisme confirme non seulement le double discours en vigueur, mais également la mystification que représente la « guerre contre la terreur ». Si la « lutte contre le terrorisme » avait un quelconque fondement, l’ensemble des médias internationaux dénonceraient l’implacable campagne terroriste que les successifs gouvernements états-uniens ont menée contre le peuple cubain depuis 1959. La censure du terrorisme contre Cuba, qui est de loin la plus sophistiquée, illustre clairement la duplicité de la presse occidentale.

La sélectivité dont font preuve les médias ne fait qu’illuminer plus fortement l’atmosphère doctrinale qui règne au sein des rédactions du monde. Le scandale des cinq citoyens cubains emprisonnés aux États-Unis est exemplaire. Si les sociétés occidentales étaient intellectuellement libres, elles dénonceraient le traitement cruel et inhumain réservé aux Cinq. Or, ce scandale judiciaire a été complètement supprimé de l’espace médiatique dominant.

Les informations passent par un filtre idéologique qui montre à quel point les fondements du totalitarisme sont profondément ancrés dans les structures des médias internationaux. En réalité, la presse, qui est censée fournir aux citoyens une information non biaisée, n’est rien d’autre qu’un outil du contrôle de la pensée et des idées puisqu’elle écarte systématiquement les débats importants comme le bien fondé et la légitimité d’une guerre terroriste contre une nation qui a choisi le sentier de l’indépendance et de l’autodétermination. Les questions fondamentales, comme le droit de Cuba à se défendre contre les agressions constantes, ne sont pas abordées.

La presse française a poussé l’indécence au point de qualifier M. Luis Posada Carriles de « combattant anticastriste », de personne « accusée de terrorisme » ou, comble de la fourberie, « d’ex-terroriste ». La prescription existe-t-elle en matière de terrorisme ? Ce crime sémantique n’est nullement remis en cause et montre combien les cloisons doctrinales fonctionnent parfaitement. Que se passerait-il si M. Oussama Ben Laden était qualifié « d’anti-Bush », de personne « accusée de terrorisme » ou « d’ex-terroriste ». Le tollé que déclencheraient de tels qualificatifs serait à la hauteur de la collusion des médias au sujet de M. Posada Carriles.

Les grands groupes de presse, d’une certaine manière, se font complices du terrorisme puisqu’à leurs yeux, les attentats sanglants contre Cuba ne revêtent aucune importance. Dans la mesure du possible, les horreurs commises au nom d’une aversion antirévolutionnaire sont occultées. Quand cela n’est plus possible, elles sont minimisées et les criminels responsables sont médiatiquement absous en toute impunité, comme le montrent les termes utilisés pour se référer au pire terroriste du continent américain.

La presse accepte tacitement de justifier un type de violence et de dénoncer ce qu’elle qualifie de terrorisme arbitraire. La nuance varie selon la victime visée : si elle est européenne ou états-unienne, les responsables sont des criminels sans foi ni loi ; lorsqu’elle est cubaine, ils deviennent des personnes « accusées de terrorisme », des « anticastristes » ou des « ex-terroristes ». L’opinion publique est la principale proie de cette tyrannie médiatique.

Le cadre idéologique établi au sein des médias censure les véritables enjeux. De ce fait, la presse, propriété des grands groupes économiques et financiers, présente des caractéristiques despotiques qui sont un péril pour l’avenir de l’humanité.

[1Du même auteur, sur le même sujet, voir : Salim Lamrani (edited by), Superpower Principles : U.S. Terrorism against Cuba (Monroe, Maine : Common Courage Press, 2005) ; Salim Lamrani (sous la direction de), Washington contre Cuba : un demi-siècle de terrorisme et l’affaire des Cinq (Pantin : Le Temps des Cerises, 2005) ; Salim Lamrani (editor), La guerra contra el terrorismo y el caso de los Cinco (Barcelona : El Viejo Topo, 2005) ; Salim Lamrani (compilador), Terrorismo de Estados Unidos contra Cuba. El caso de los Cinco (La Havane : Editorial José Martí, 2005).

[2« Les confessions de Luis Posada Carriles », Voltaire, 14 juin 2005.

[3El Nuevo Herald, « Miedo a ser jurado en juicio de espías », 2 décembre 2000