Les flux financiers Sud-Nord, issus du paiement des intérêts de la dette qui pénalisent outrageusement les pays en voie de développement, sont intolérables. Il faut solder cette situation tant elle est incompatible avec une action sérieuse de lutte contre la pauvreté. L’éthique exige également que les instances politiques nationales et globales prennent les mesures qui s’imposent pour réduire des disparités trop criantes.
Toutefois, avec l’affaiblissement du leadership politique, les administrations compétentes, tant au niveau national qu’au niveau international, se sont peu à peu imposées comme les seuls gestionnaires du développement et restent peu perméables aux critiques face aux résultats de leurs engagements. On ne peut laisser le défi de la pauvreté dans les seules mains des agents spécialisés de l’État. Il faut une implication de la société civile et des pouvoirs locaux. De nombreuses coopérations liant des villes ou des ONG aux pays du Sud sont déjà en cours et il faut davantage leur rendre justice. La « coopération décentralisée »représente un phénomène intéressant en raison du nombre de collectivité qu’elle permet de mobiliser et des savoir faire qu’elle permet de développer au niveau local.
Cette coopération ne doit pas se substituer, mais doit s’additionner à celle des organisations internationales. Les villes peuvent être des relais et des points d’ancrage de l’action citoyenne et c’est cette dimension qui sera reconnue lors de la constitution d’une « ONU des villes » lors d’un prochain congrès mondial à Paris. Cette coopération est la marque de la volonté des villes de s’engager davantage dans la mondialisation.
C’est dans cet esprit que Genève, Lyon et la province de Turin ont décidé avec le Sénégal et Dakar de créer un Fonds de solidarité numérique (FSN). Il n’est pas dans l’intention de ce fonds de se substituer aux mécanismes de financement déjà existants, mais de les compléter en apportant une réponse aux besoins urgents des collectivités locales dans les pays en développement pour réduire leur « retard numérique ». C’est l’une des conditions incontournables de leur essor économique et politique.
« Le Sud a besoin des villes du Nord », par Christian Ferrazino et Abdoulaye Wade, Le Monde, 1er Mai 2004.
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